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Couverture de Les Grands Hôtels à l’épreuve du temps (Jean El Gammal, Édul, 2024) Show/hide cover

Entre créations et conjoncture aléatoire

Après la Première Guerre mondiale, la fréquentation s’accroît à nouveau dans certaines stations1 et la vague de constructions interrompue reprend surtout au temps des « années folles », dans un contexte qui s’accompagne du regain2 ou de l’ouverture de nombreux grands hôtels. Beaucoup d’entre eux, du moins dans les capitales et les plus grandes villes, relèvent du style Art Déco ou lui sont associés. Les années 20 servent également de cadre à de nouvelles représentations littéraires, illustrées notamment par des écrivains américains ou des voyageurs tels que Paul Morand, tandis que des hôtels en partie imaginaires sont décrits par Joseph Roth ou Vicki Baum, ou évoqués de manière kaléidoscopique par Francis Scott Fitzgerald. Au début des années 1930, l’élan se ralentit en raison de la crise multiforme que traversent bien des pays, même si des références littéraires subsistent, notamment, dans des genres fort différents, avec George Orwell et Léon-Paul Fargue.

Une vague « Art déco » ?

Le style évoqué ne se rapporte évidemment pas à la totalité des établissements mentionnés dans cette section ou dans la liste figurant en annexe. Il s’agit, d’autant que cette mention est surtout relevée à partir du milieu des années 1920, d’une dominante symbolique, qui concerne à la fois de grands hôtels pouvant faire l’objet d’une approche spécifique et les « années folles ». Il est vrai que l’on commence aussi à voir apparaître, sans qu’il ne soit guère question de styles, sauf pour le troisième cité, des groupes (Hilton en 1919, Marriott en 1926, les Paradores espagnols en 1928, ainsi que les futurs Leading Hotels of the World3, la même année), qui relèvent davantage des parties suivantes.

Dans un premier temps, les hôtels construits ou ouverts après la Grande Guerre sont de styles divers et peuvent difficilement être regroupés en catégories, encore que la dimension du loisir soit très présente, sur différents continents, avec des évolutions qui s’avèrent parfois significatives. Ainsi, c’est en 1923 que de riches Américains, Gerald et Sara Murphy, décident de rester en été à l’Eden Roc d’Antibes, qui devient l’un des premiers palaces azuréens ouvert l’été4. Ils ont donné ainsi à leur échelle ainsi une impulsion au tourisme de luxe estival5.

Avant 1925, quelques adresses, en dehors de ceux – nombreux – des hôtels célèbres qui ont maintenu ou repris leurs activités6, commencent à attirer l’attention sur différents continents. C’est le cas de l’Hôtel Imperial de Tokyo reconstruit dans un style organique par Frank Lloyd Wright et qui survécut en quelque sorte au tremblement de terre de 19237, du Biltmore de Los Angeles8, du Copacabana Palace de Rio de Janeiro9, du Polana Serena de Lourenço Marques, au Mozambique, en 1922, de la Mamounia de Marrakech10 en 1923 ou du Gleneagles d’Auchterarder, près de Saint-Andrews, en Ecosse, l’année suivante. En Italie, le Select Palace, futur Grand Hôtel Principe di Piemonte a ouvert ses portes en 1922, à Viareggio, station, où, trois ans plus tard, l’Excelsior, à la curieuse forme de ziggurat, s’inscrit dans le paysage balnéaire11.

Figure 1. Vue aérienne du Copacabana Palace, circa 1929 (source : Domaine public)

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Figure 2. Façade de l'Hôtel Polana, Maputo, Mozambique, 2008 (photographie de F Mira, licence CC-BY-SA)

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Même si l’Exposition des Arts décoratifs à Paris en 1925 ne peut tenir lieu de seul point de repère12, les grands hôtels parisiens qui ouvrent leurs portes cette même année sont marqués à des titres divers par ce style. Ils s’inscrivent durablement, de plus, dans le paysage des quartiers prestigieux de la capitale, principalement dans le huitième arrondissement, avec le Bristol13 et le George V en 1926-192814, suivi par le Royal Monceau et le Prince de Galles en 1928 et 1929 (curieusement non signalé par le Guide Michelin dans les années qui suivent) et le Lancaster en 1930. Durable est aussi l’implantation, avenue Kléber, de l’Hôtel Raphaël, lancé par l’hôtelier Léonard Tauber15. On peut aussi mentionner, en 1927, le Millenium (futur Commodore), boulevard Haussmann, et, en 1928, l’hôtel Pierre Ier de Serbie, à présent disparu16. Dans le 17e arrondissement, même s’il ne s’agit pas exactement d’un palace, l’Hôtel Mercedes, dû à Pierre Patout, « l’un des maîtres incontestés de l’Art Déco », attire l’attention par ses qualités architecturales17. Dans les grandes villes françaises, ce regain de l’hôtellerie se traduit moins par des créations, même si l’on peut rappeler l’ouverture – dans un immeuble construit en 1894 -, du Carlton de Lyon, en 1925. Cinq ans plus tard, un bel ascenseur Art Déco y est installé18.

Ce style est également présent dans les stations balnéaires ou thermales, avec le Golf Hôtel de Valescure (1924), le Miramar de Biarritz et le Westminster du Touquet19 (1925), l’Hermitage de La Baule (1926), Le Provençal de Juan-les-Pins (192620), le Splendid de Dax, dans les Landes21, le Plaza de Biarritz, construit par Louis-Hippolyte Boileau, l’éphémère Atlantic Hotel de Saint-Jean de Luz, dû à Robert Mallet-Stevens (1928)22 et le Martinez de Cannes (192923). À Monte-Carlo, l’inauguration du Beach, l’année précédente, s’accompagne d’une fête fastueuse, orchestrée à la demande et aux frais de la Société des Bains de Mer par la fameuse « commère de Hollywood » Elsa Maxwell. L’hôtel est d’emblée associé à une piscine olympique d’eau de mer bordée de tentes très recherchées24.

Vers l’intérieur de la Provence, le Roi René d’Aix-en-Provence, qui date de 1928, se caractérise pour une part par son style régionaliste. À Vittel, le chantier de L’Ermitage, qui « adopte les allures d’un hôtel suisse pour un palace ultramoderne à proximité d’un golf aménagé sur d’anciens marécages »25 est placé sous la direction de l’architecte nancéien Fernand César26. Ce nouvel établissement de grand luxe ouvre en 1929, de même, toujours à Vittel, que l’hôtel Splendid, qui devint après la Seconde Guerre mondiale et demeure l’hôpital de la ville. En Normandie l’hôtel du Golf, à Deauville, complète en 1931 le dispositif des grands hôtels d’avant-guerre, dirigé depuis 1926 par François André, qui avait pris la succession de son associé disparu, Eugène Cornuché27.

Dans les pays étrangers, l’élan se poursuit en Amérique du Nord, surtout aux Etats-Unis, à la faveur de la vague de prospérité des années 1920 et même un peu au-delà28. C’est le cas sur la côte Est, avec, en 1925, Le Gramercy Park de New York29 et le Mayflower de Washington30 et en 1927, le Warwick31 à New York.

En Californie, les grands hôtels sont nombreux, avec le Mark Hopkins de San Francisco (1926) et, à Los Angeles et Hollywood, le Roosevelt en 192732, le Château Marmont en 1929, d’abord comme ensemble immobilier de luxe33, le Beverly Wilton Shine l’année suivante et le Sunset Tower en 1931.

Un nouvel hôtel Biltmore, comme les précédents construit sous la responsabilité du cabinet new-yorkais Schultze & Weaver, a ouvert ses portes à Miami Beach en 192634. Non loin de là, à Boca Raton, l’hôtel du même nom, construit par l’architecte Addison Mizner, relève du style Art Déco. Ouvert en 1926, il connaît de nombreuses adjonctions par la suite35. Toujours dans un cadre balnéaire, Hawaï est doté d’un hôtel de luxe avec le Royal Hawaian en 1927, de style en partie régionaliste et exotique36. A la charnière des années 20 et 30, le Pierre37, le Carlyle38 et l’Essex House de New York datent respectivement de 1929, 1930 et 1931, tandis que le Ritz Carlton de Philadelphie accueille ses clients à compter de l’année suivante.

En regard de la France et des États-Unis, les ouvertures et réaménagements dans plusieurs pays européens sont peu nombreuses entre le milieu des années 1920 et le début des années 30 : on peut citer L’Esplanade de Zagreb en 192539, le Kasino (futur Grand Hotel) de Sopot, près de Dantzig, en 192740, le Principe di Savoia à Milan la même année, le Plaza de Bruxelles en 1930, ainsi que le Strand Palace en 1925 et le Dorchester de Londres en 1931. Dans des villes nettement moins peuplées, au Portugal, l’Asturia et le Curia Palace ouvrent leurs portes à Coimbra en 192641, et le Palace d’Evora apparaît en 1930. Dans l’Espagne voisine, les hôtels Colon et Alfonso XIII à Séville datent de la même année : 1929. En Grèce, le célèbre King George d’Athènes accueille des clients l’année suivante.

Dans les stations balnéaires italiennes, à cette époque – surtout marquée par le régime de Mussolini – certains établissements ouvrent, comme, à Riccione, le Grand Hotel en 1928. Au titre des stations thermales, on peut signaler, au Grand Hotel Montecatini Terme et au Grand Hotel Terme de Salsomaggiore Terme, le rôle du céramiste et décorateur Galileo Chini42.

L’hôtellerie coloniale, y compris dans des protectorats, outre des établissements prestigieux qui enchantent certains visiteurs43, connaît quelques ouvertures ou constructions, notamment en Afrique du Nord, à Fès avec le Grand Hôtel ouvert en 192944, à Tanger avec l’Hôtel El Minzah, en 193045, ou à Alger, la même année avec l’Aletti, seul établissement conçu dans cette ville par le célèbre hôtelier Joseph Aletti46. À Biskra, Alexandre Dumaine a travaillé à l’Hôtel Transatlantique, qui, ouvert en 1923, complète l’offre au titre du tourisme de luxe47.

En Asie, mentionnons le Cambodge avec le Royal en 192948, et l’Inde avec l’Imperial de New Dehli en 1931. Par ailleurs, dans la ville de Dalat, station de vacances située au nord-est de Saïgon, édifiée à partir de 1900, un guide de 1930 permet de situer au sommet de la hiérarchie des Hôtels le Lang-Bian Palace Hôtel 49.

Dans des pays indépendants ou les protectorats où les influences occidentales sont fortes, citons en 1929 le Cathay à Shanghai50, où le cosmopolitisme se répand – plus encore dans les années 1930, du reste51. Non loin des Etats-Unis, le Nacional de Cuba date de 193052. C’est un an plus tard qu’ouvre l’hôtel King David de Jérusalem dans la Palestine mandataire53. En 1932, commence l’histoire du Grand Hôtel d’Angkor.

Un certain nombre de ces établissements, ou de plus anciens, font l’objet d’annonces et d’articles dans la presse. Quelques-uns ont une sorte d’aura littéraire. Si certains écrivains ou journalistes évoquent les grands hôtels un peu à la manière de guides, d’autres, à cette époque ou plus tardivement, adoptent des approches plus complexes, voire critiques, dans de rares cas.

Réalités et imaginaires

Reconstitué, mentionné ou mythifié, le Grand Hôtel – parfois dès le titre d’un roman – entre dans certaines thématiques littéraires, voire cinématographiques54, des années 1920 et du début des années 1930. Nous reviendrons sur le New York de Paul Morand, avant de faire quelques observations sur la manière dont il a présenté les hôtels d’Asie. Nous évoquerons aussi – outre George Orwell dans la section suivante – trois auteurs fort différents : Francis Scott Fitzgerald, Joseph Roth et Vicki Baum, cette dernière, dans un premier temps, pour Menschen im Hotel, plus connu en France sous le titre – un des premiers du genre, si l’on peut dire – Grand Hôtel.

Parcourant New York à la fin des années 1920, Paul Morand note que les hôtels modernes – il cite notamment le Saint Regis, le Plaza, le Ritz-Carlton et l’Ambassador, qui ont en général été construits avant la décennie – « se rapprochent davantage du type européen » que les plus anciens, et qu’ils sont à la fois plus silencieux et beaucoup plus chers55. L’écrivain-voyageur ne fait pas de ces hôtels des lieux de fiction – ou de statut intermédiaire, d’un point de vue littéraire.

Dans Rien que la terre, peu auparavant, il traitait de manière expéditive les hôtels d’Asie, en homme pressé, insérant quelques pages à leur sujet dans ses évocations relevant d’un tour du monde. Il faisait un rapprochement entre le palace – expression continentale apparue à la fin du 19e siècle – et le caravansérail oriental. La présentation se complaît dans les stéréotypes prétendument nationaux – avec un hommage aux Suisses qui organisent des conférences internationales dans leurs grands hôtels – avant d’assener qu’à part un hôtel japonais à Kyoto et un hôtel américain à Manille (celui-ci de style sobre), les hôtels d’Asie sont « chers et mauvais », y compris les « hôtels anglais de Singapore et Hong-Kong », le confort de l’époque victorienne étant périmé. Au sujet de la Chine, il est allégué que les touristes sont peu nombreux à Pékin, alors que les hôtels de Shanghai seraient « surtout des restaurants, des bars … et autres lieux ». Les toits, avec leurs « sarabandes et jazz-bands » seraient de « style casino, meringué ». En ce qui concerne l’espace colonial français, le contraste serait grand entre les établissements d’Indochine et « ces hôtels transatlantiques de notre Afrique du nord, si modernes, si confortables, si bon marché et si heureusement et discrètement inspirés des styles locaux »56.

Francis Scott Fitzgerald est sans doute l’écrivain qui a le plus mentionné des établissements hôteliers (pas exclusivement prestigieux57) dans les nouvelles et romans qui l’ont fait connaître au long de la décennie, voire au seuil de la suivante, pour Tendre et la nuit. Parfois, le titre est un peu trompeur, la nouvelle «Un diamant gros comme le Ritz » (l’hôtel Ritz-Carlton de New York), étant une sorte de parabole sur la richesse. Lorsqu’il est question d’hôtels, c’est surtout à travers des fêtes ou de brèves évocations de séjours, y compris en Europe, le lecteur – sans le savoir nécessairement – se trouvant sur les pas de l’écrivain lui-même et de son épouse Zelda58.

On mentionnera surtout ici les pérégrinations des personnages de Tendre est la nuit, roman dont la première édition date de 1931, mais qui ne rend pas compte d’une la conjoncture de crise, mais d’une forme de nostalgie et de transposition de tensions, les figures de l’écrivain et de son épouse, ainsi que de Gerald et Sara Murphy59, occupant une place importante. Plus généralement, c’est en Europe que pour l’essentiel évoluent les personnages, de l’« Hôtel des Étrangers  de Gausse60», inspiré par le Grand Hôtel du Cap61 à des établissements situés à Gstaad, Innsbruck, Rome et Monte-Carlo62. Dans l’ensemble, il s’agit principalement, parfois dans un cadre très sobre63, d’une vie de loisir sur la Riviera. À partir de 1929, l’hôtel des Belles Rives de Juan-les-Pins remplace en quelque sorte la Villa Saint-Louis. On peut voir de nos jours une plaque commémorative près de l’entrée de l’établissement, dont le site fait référence à l’œuvre de Fitzgerald64.

À propos de la France, l’écrivain a aussi évoqué le Ritz – moins qu’Hemingway plus tard – notamment à travers des pages nostalgiques et angoissées, relatives aux excès des années 20, dans une nouvelle parue en 1931, « Return to Babylon »65.

Durant les années 1920, même si elles sont souvent associées aux « Années folles », les représentations des grands hôtels en Europe – tout au moins dans les pays en transition – revêtent un caractère parfois sombre. Au sujet de l’après-guerre, Hotel Savoy de Joseph Roth met d’ailleurs en évidence les ambiguïtés, voire les clivages de classe au sein de l’établissement et de la ville non nommée, proche de la Russie où affluent des prisonniers, où il se trouve66. La description contenue dans le début de ce court roman, publié en 1924, s’ouvre sur des apparences :

Plus européen que tous les autres établissements de l’Est, tel m’apparaît l’hôtel Savoy avec ses sept étages, son blason doré et son portier en livrée.67

Elles sont en partie trompeuses, car à l’opulence relative des premiers étages et de leurs clients s’oppose le dénuement des occupants des derniers étages de l’hôtel, si bien que l’hôtel symbolise à la fois la richesse et le malheur68. Il est d’ailleurs détruit par les flammes à la fin du roman.

Celui-ci, objet de bien des commentaires ultérieurs, peut être inscrit dans une période marquée par les échos de la révolution bolchevique, de la fin de la guerre, voire de la dislocation de l’empire austro-hongrois. Dans l’un des chapitres de sa thèse, le grand critique et romancier Claudio Magris voit dans l’hôtel une évocation des « cercles d’un au-delà dantesque »69. On est alors fort loin de l’image stéréotypée du grand hôtel, mais davantage dans un temps de déshumanisation70. Le livre fait également écho à la condition de son auteur qui :

dans sa vie inquiète et vagabonde n’avait pas d’autre chez lui que les chambres d’hôtel de toute l’Europe et s’est autodéfini comme Hotelbürger, Hotelpatriot.71

On peut d’ailleurs établir des rapprochements entre cette citation et des articles à caractère en partie autobiographique de Joseph Roth, à quelques années de distance, tel celui-ci, paru dans un journal allemand :

L’hôtel que j’aime comme une patrie est situé dans une des grandes villes portuaires d’Europe, et les lourds caractères romains, dorés, qui font briller son nom banal par-dessus les toits des maisons surgissant peu à peu, sont à mes yeux des drapeaux de métal, des fanions fixes qui étincellent pour vous saluer au lieu de flotter.72

C’est cette même année 1929 que parut le roman de Vicki Baum. Celle-ci se tient en quelque sorte en retrait en faisant se croiser dans un palace berlinois – probablement inspiré73 par l’hôtel Adlon74, il est censé être le «  meilleur hôtel de Berlin » selon l’un des clients75 – nombre de personnages, notamment une chanteuse, un baron, un industriel, un commis et une modèle, en présence ou non de membres du personnel de l’établissement, dans une atmosphère assez sombre, même si les dimensions politiques et satiriques sont nettement moins marquées que dans Hotel Savoy. Il est beaucoup plus longuement question des « rouages »76 d’un grand établissement. À la fin, l’un des personnages, le docteur Otternschlag, est « l’image pétrifiée de la solitude et du détachement », face à la rue :

La porte tournante pivote : elle tourne, tourne, tourne.77

Le grand succès du livre donna lieu à une pièce de théâtre, puis à une adaptation cinématographique prestigieuse, le film d’Edmund Goulding, avec Greta Garbo et Joan Crawford, Wallace Beery, John et Lionel Barrymore. Sorti en 1932, il obtint l’oscar du meilleur film.

À cette date, sans que le prestige associé aux grands hôtels ait disparu, la crise produisait de fâcheux effets dans nombre de pays – notamment l’Allemagne. Il convient à présent de marquer certaines caractéristiques de ce changement de contexte dans l’univers des grands hôtels, avant la période de l’immédiat avant-guerre.

Difficultés et tensions des années de crise

Elles sont parfois présentes, sous des formes diverses78, lorsqu’il s’agit des années 1920, mais la décennie suivante en est le cadre principal.

On constate notamment la fin assez rapide de la vague de constructions qui s’était amplifiée à partir du milieu de la décennie. À compter de 1932-1933, malgré quelques décalages, par exemple en Italie79, aux États-Unis80, au Liban81, ou au Japon82, voire des innovations83, il n’y a plus guère de constructions et d’inaugurations de grands hôtels traditionnels.

L’un des établissements plus novateurs en Europe, le Latitude 43 de Georges-Henri Pingusson, figure du mouvement moderne en architecture, situé à l’entrée de Saint-Tropez et ouvert en 1932, connaît rapidement des difficultés qui aboutiront à une faillite à la fin des années 193084. Certes, elles ne sont pas toujours irréversibles pour des hôtels moins récents, car un changement de direction, comme à l’Impérial Palace d’Annecy, peut entraîner un regain d’activité durant la seconde partie de la décennie85. Néanmoins, y compris dans le cas d’hôtels relevant depuis le début du siècle du tourisme de luxe, les pertes se constatent, en relation avec la baisse du taux d’occupation. Il passe par exemple de 70% au 51% au Plaza de New York entre 1929 et 193286. La chronologie de la crise peut d’ailleurs varier selon les pays, voire les établissements : dans le cas du Grand Hôtel de Paris, l’année la plus critique est 1934, et des fluctuations s’observent par la suite87.

Dans certains grands établissements, l’insouciance ou l’opulence n’ont pas brusquement disparu. C’est par exemple en 1933 que le Copacabana Palace « sert de décor au film Carioca qui réunit pour la première fois Fred Astaire et Ginger Rogers »88, dont plusieurs comédies musicales ultérieures jouent d’ailleurs sur l’imaginaire du luxe. Dans le domaine littéraire, des ouvrages ultérieurs ont montré ou suggéré que celui-ci demeure présent pendant la crise89.

Néanmoins, la chronique ou des mémoires font parfois état d’événements attestant l’instabilité politique, voire les conséquences de la crise. Par exemple, Elisabeth de Gramont rapporte l’arrivée en exil – au Meurice – d’Alphonse XIII d’Espagne en 1932, ainsi que le suicide au George V du célèbre financier suédois Ivar Kreuger90. Certains épisodes de ce type sont plus difficiles à interpréter, mais c’est dans un contexte de crise financière et personnelle que l’écrivain très atypique Raymond Roussel, riche fils de famille admiré par les surréalistes pour ses œuvres novatrices et confidentielles, est retrouvé mort en juillet 1933 au Grand Hôtel des Palmes de Palerme. Bien plus tard, en 1971, l’écrivain sicilien Leonardo Sciascia publia un assez court écrit, récemment réédité en français, sur l’enquête de police effectuée à cette occasion91.

Relative à des hôtels parisiens pendant la crise92, l’évocation de Léon-Paul Fargue, qui s’exprime volontiers sur un registre ironique ou assez léger, est plutôt mesurée, mais témoigne des difficultés rencontrées dans Le Piéton de Paris93. Plus sombre est le tableau, brossé d’un point de vue tout différent, de George Orwell dans son fameux Dans la dèche à Paris et à Londres. Concernant certains grands hôtels de la capitale française, il s’agit surtout d’aborder le « subtil système de caste qui régit la vie d’un hôtel »94 et de montrer l’envers du décor de tels établissements pour les travailleurs de peine. Néanmoins, un « hôtel X. », proche de la Concorde, « vaste et bien organisé, passait pour l’un des moins mauvais établissements qu’un plongeur puisse trouver à Paris »95.

Peut-être peut-on évoquer aussi le déclin de certains grands hôtels de la Côte d’Azur, ayant tenté de subsister dans les années 30. La combinaison de la crise et de certains changements de modes de vie, qui bénéficient – pas toujours à l’hôtel, loin s’en faut – au tourisme estival, détourne la clientèle de grands établissements comme ceux de Cimiez96. Plus généralement, l’hôtellerie balnéaire de luxe est sévèrement touchée par la crise97.

Celle-ci est également présente en Algérie, où une hôtellerie parfois luxueuse avait été créée, notamment par la Société des voyages et des hôtels nord-africains, en relation avec des circuits combinant automobiles et trains. Dans les années 1930, la riche clientèle étrangère est beaucoup moins présente, tandis qu’une demande se fait jour, à compter de 1936, en faveur d’un tourisme moins élitiste98.

Néanmoins, nous allons le voir dans le chapitre suivant, des dénominations et des localisations des « grands hôtels » permettent, tout au moins au sujet de la France métropolitaine, d’élargir ou de déplacer quelque peu le cadre de la réflexion.

  • 1 C’est par exemple le cas au Pays basque, où la jeune Irène Némirovsky fréquente avec ses parents plusieurs palaces et grands hôtels, dont l’Hôtel du Palais de Biarritz et l’Eskualduna d’Hendaye-Plage : voir Philipponnat Olivier et Lienhardt Patrick, Irène Némirovsky, Paris, Livre de Poche, 2015, p. 137, 178-180 et 345. Dans certains de ses livres, elle ne donna pas d’image flatteuse de ces établissements.
  • 2 Au Savoy de Londres, Fred et Adele Astaire dansent sur le toit pour une campagne publicitaire en 1923 et George Gershwin se produit en 1926 pour la première britannique de « Rhapsody in Blue » et dans le cabaret du grand hôtel en 1929 : voir Williams Olivia, The Secret Life of the Savoy, p. 157, p. 2 du cahier photographique et p.170.
  • 3 Appelés initialement, à l’initiative d’hôteliers européens souhaitant attirer la clientèle américaine, The Luxury Hotels of Europe – and Egypt, en 1930 : voir Boyle Chris, « Leading Hotels of the World Celebrates 85 Years », Elitetraveler, 20 novembre 2013, consulté le 22 août 2023, https://elitetraveler.com [consulté le 15 mars 2024]. À la fin des années 1920, il y avait 36 hôtels.
  • 4 Une expérience, « Nice l’été », à partir de 1923, conduit à des succès deux ans plus tard et au-delà : voir Schor Eliane, étude citée, p. 110-112. Certains hôtels d’avant-guerre connaissent néanmoins des difficultés, comme l’Impérial, racheté par la ville en 1927 et transformé en lycée.
  • 5 Voir le documentaire de Blanchard Emmanuel, « L’Odyssée des plages », France 3, 7 septembre 2020.Parmi leurs amis, figurent Hemingway, Cole Porter, Picasso et son épouse Olga, ainsi que le couple Fitzgerald.
  • 6 Certains romans parus à la fin de la décennie renvoient d’ailleurs presque uniquement à des adresses d’avant -guerre : voir Christie Agatha, Le Train Bleu, traduction de É. Lethel, Paris, la Librairie des Champs-Élysées, 1991 [éd. orig. 1928]. Il y est question du Savoy de Londres, du Ritz de Paris et du Negresco de Nice.
  • 7Stipe, Margo, “Wright and Japan”, dans Alofsin Anthony (dir.), Frank Lloyd Wright-Europe and Beyond, Berkeley, University of California Press, 1999, p. 28-34. Nous remercions Gilles Marseille pour ses indications.
  • 8 Ouvert en 1923, il vit se dérouler huit cérémonies des oscars et, bien plus tard, la convention démocrate de 1960 qui désigna John Kennedy : voir le Guide vert Michelin Los Angeles, 2020, p. 14-15.
  • 9 Inauguré par Mistinguett, note une biographe de Françoise Hardy à propos d’un séjour bien plus tardif : voir Lelièvre, Dominique, Françoise Hardy étoile distante, Paris, Flammarion, 2022, p. 110. À l’occasion du centenaire de l’hôtel, voir Jacoberger-Lavoué Virginie, « Et le « Copa » créa Copacabana », Les Échos Week-End, 21-22 juillet 2023, p. 51-55.
  • 10Bonin Sylvie, « À la Mamounia, on croit au Paradis », Trois étoiles, hiver 2018, p. 28. Les architectes étaient Henri Prost et Antoine Marchisio.
  • 11Pacciarotti Giuseppe, Grand Hotel…, op. cit.p. 111.
  • 12 Les origines du style Art déco sont parfois situées vers 1910 : voir Texier Simon, Architectures Art déco – Paris et environs, Paris, Parigramme, 2022.
  • 13 Voir le documentaire de Brand Susanne (Arte, 2020). Hippolyte Jammet, le créateur de l’hôtel, a réaménagé un hôtel particulier à l’abandon de la rue du Faubourg Saint-Honoré. Les architectes sont Urbain Cassan et Gustave Umbdenstook : voir la photographie reproduite dans Hôtel Métropole, op. cit., p. 57.
  • 14Texier Simon, op. cit., p. 76-77 : l’auteur mentionne les architectes Constant Lefranc et Georges Wybo et signale la création de l’extension de l’hôtel avenue Pierre-Ier-de-Serbie en 1930.
  • 15Teissier Alexandre, Le Grand Hôtel, op. cit., p. 212.
  • 16 Voir le Guide Baedeker de 1931, p. 4-6. Citons aussi, dans le huitième arrondissement, l’Élysée Palace (1927), le Château Frontenac, l’Hôtel de Paris – d’Émile Molinié et Charles Nicod : voir le livre cité de Tixier Simon, op. cit., p. 68 – et le Napoléon (1928).
  • 17Texier Simon, ibid., p. 80-81. Des photographies de la façade et de l’intérieur de l’hôtel, décoré par Bernard André, se trouvent dans Hôtel Métropole, op. cit., p. 59 et 88.
  • 18 Voir la brochure de l’hôtel, « L’histoire du Carlton ».
  • 19 Où le Royal Picardy, ouvre en 1929 avant de connaître bien des difficultés : voir Delorme Franck, étude citée dans Tous à la plage !, op. cit., p. 170-171. Sur le Westminster, voir Massalovitch Sophie, « Délicieusement vôtre », Challenges, 17 novembre 2022, p. 123. Le nom de l’hôtel rend hommage à la duchesse de Westminster, marraine de l’hôpital aménagé pendant la Grande Guerre.
  • 20 Frank Jay Gould est à la l’origine de sa construction : voir le documentaire de Blanchard Emmanuel, « L’Odyssée des plages » et Courcy Anne de, Chanel’s Riviera-Glamour, Decadence and Survival in Peace and War, Londres, Weidenfeld & Nicolson, 2020, p. 56-57 (Frank Jay Gould était le second mari de Florence Gould, d’origine française).
  • 21 Qualifié d’« exquis » par Benoît Duteurtre et « d’une grande pureté avec ses couleurs bleues et blanches, son salon-fumoir, ses escaliers, ses vitraux, agencés en 1928, par l’architecte André Granet » : voir Dictionnaire amoureux…, op. cit., p.422.
  • 22Kosinski, Sophie et Micheletti Eric, Grands Hôtels du bord de mer, op. cit., p. 70-71, et, pour plus de détails, le livre cité de costet Bertrand, Palaces basques 1890-1935.
  • 23 Ancienne Villa Marie Thérèse, propriété d’Alphonse de Bourbon, transformée en palace par Emmanuel Martinez : voir Assor Constance, « À Cannes, le Martinez écrit une nouvelle page de sa légende », Le Point, 13 juillet 2018, consulté sur lepoint.fr.
  • 24Béglé Jérôme, « Le Beach », une affaire de femmes », Le Journal du Dimanche, 7 août 2022, p. 32.
  • 25Martin Philippe, Le thermalisme en Lorraine, op. cit., p. 34.
  • 26Contal Marie-Hélène, « L’architecture thermale de Vittel », dans Des sources du thermalisme, op.cit, p. 307, et Munier Bertrand, Le thermalisme en Lorraine…, op. cit., p. 134-135. Fernand César est aussi l’architecte de l’hôtel des Thermes, qui a ouvert en 1925.
  • 27Aublet Yves, dans Grands hôtels de la Côte Fleurie, op. cit., p. 85 et suiv. (nombreux documents). Construit sous la direction de Georges Wybo, l’hôtel du Golf fut inauguré le 1er août 1931, en présence d’André Citroën.
  • 28 Au Canada, on peut mentionner le Royal York de Toronto, en 1929.
  • 29 Par ailleurs, le Waldorf-Astoria est détruit en 1929 et laisse la place à l’Empire State Building.
  • 30 Où le Hay-Adams ouvre en 1927.
  • 31 Selon le Guide Rouge Michelin New York de 2006, p. 441, le magnat de la presse William Randolph Hearst aurait fait bâtir cet hôtel pour que sa compagne Marion Davies puisse accueillir ses amis d’Hollywood et des milieux théâtraux.
  • 32 Créé à l’initiative de Mary Pickford, Douglas Fairbanks et Louis B.Mayer, il fut le cadre en 1929 de la première cérémonie des oscars : voir le Guide vert Michelin Los Angeles, op. cit., p. 32.
  • 33 Il est transformé en hôtel en 1931. Sur son histoire mouvementée, voir Minne Olivier, Un château pour Hollywood, Paris, Séguier, 2020.
  • 34Ozanne Marie-Angélique, « Miami vibes », Madame Figaro, 30-31 mars 2018, p. 178 et Barisione Silvia, « L’architecture de Miami Beach », dans Bréon, Emmanuel (dir.), France-Art Déco-Amérique du Nord, Cité de l’Architecture et du Patrimoine, Norma Éditions, 2021, p. 268.
  • 35De Alberti Jean-Michel, « En Floride, le retour du « Boca Raton » », Les Échos Week-End, 6 octobre 2023, p. 96. Sa rénovation complète a été financée en 1922 par l’industriel de l’informatique Michael Dell.
  • 36 Des décennies plus tard, Joan Didion évoque le « palais rose » du Pacifique, lointain et vaguement exotique, bâti par la Matson Line pour surclasser ses concurrents tels que le Coronado, le Broadmoor, Del Monte » : « Dans les îles » (daté de 1970), dans L’Amérique-Chroniques, Livre de Poche, 2016, p. 311.
  • 37 Pour son inauguration en octobre 1930, l’hôtel invite Auguste Escoffier : voir Baecque Antoine de, La France gastronome, op. cit., p. 236 et la préface de Ory Pascal à la réédition des Souvenirs culinaires, op. cit., p. 10.
  • 38 Fréquenté par la suite par de nombreuses personnalités, dont des présidents américains, à partir de Harry Truman. Voir le livre préfacé par Reginato James, The Carlyle, Paris, Assouline, 2021.
  • 39 Destiné aux voyageurs de l’Orient-Express, il fait l’objet d’une description située en 1943 dans KERR Philip, La Dame de Zagreb qui le date du « début du siècle » et mentionne « plusieurs plafonds Art déco » : voir la réédition du Livre de Poche, 2017, p. 241, traduction de P. Bonnet,. Ce passage est cité dans un article de Sorgue Pierre, « 48 heures à Zagreb », Le Monde, 25 mai 2023, p. 28.
  • 40 Faisant désormais partie de la chaîne Sofitel, il est présenté comme « l’un des cinq hôtels les plus légendaires d’Europe », par Doustaly Thomas, « Gdansk, la ville à mille temps », Le Monde, 13-14 août 2023, p. 15.
  • 41Denby Elaine, Grand Hotels, op. cit., p. 247-248.
  • 42 Une exposition a eu lieu en 2023 pour rendre hommage à cet artiste- auquel une salle du Musée International de la Céramique est consacrée – dans le Palais des Congrès (ex Grand Hotel Terme) de Salsomaggiore Terme. Elle est intitulée « Oro e Oriente ». Nous remercions Eva Charbit pour les informations qu’elle nous a procurées.
  • 43 Tel le Palais Jamaï de Fez, au Maroc, où Colette a séjourné en 1926 : voir Peltre Christine, Le voyage enAfrique du Nord, op. cit., p. 55.
  • 44Jelidi Charlotte, Fès, la fabrication d’une ville nouvelle (1912-1956), Lyon, ENS Éditions, 2012, p. 192-193.
  • 45Leroy Florence, Tanger mis en scènes, Paris, Espaces et Signes, 2020, p. 26-27, Bercoff André, Mémoires de Palaces, op. cit., p. 119-123 et Duteurtre, Benoît, op. cit., p.423.
  • 46Cousseau Jacques, Palaces et Grands hôtels de Vichy, op. cit., p. 41. Cinq ans auparavant, le Majestic de Nice avait rejoint son groupe ; voir aussi Zytnicki Colette, L’Algérie, terre de tourisme, op. cit., p. 198 : l’hôtel accueillit Charlie Chaplin en 1931.
  • 47Ibid., p. 100.
  • 48 Cet hôtel est évoqué par Bouvet Jean-François, « Ce bar où les reporters attendaient les Khmers rouges », Libération, 6 août 2018, p. 16-17 : « L’hôtel est de ces palaces que la France a construits jadis dans les villes phares de son empire colonial pour y abriter la suffisance alanguie des visiteurs occidentaux en quête d’exotisme ».
  • 49Jennings Eric, La ville de l’éternel printemps-Comment Dalat a permis l’Indochine française, Paris, Payot, 2013, p. 189.
  • 50Bergère Marie-Claire, Histoire de Shanghai, Paris, Fayard, 202, p. 260-261. L’hôtel est englobé dans un immeuble au toit pyramidal, qui abrite aussi les appartements privés du « plus flamboyant des capitalistes shanghaiens, Sir Victor Sassoon » (p. 260).
  • 51Lee Leo Ou-Fan, « Shanghaï moderne. La culture urbaine et l’invention du cosmopolitisme », dans Idier Nicolas (dir.), Shanghaï-Histoire, promenades, anthologie et dictionnaire, Paris, Laffont-Bouquins, 2010, notamment p. 467-468.
  • 52Bercoff André, op. cit., p. 224-228 et Sorgue Pierre « Le monument « nacional » de La Havane », M – Le Magazine du Monde, 13 août 2022, p. 26-31 (p. 27, il est question de « « mediterranean style », qui mêle « deux tours andalouses et des gargouilles d’inspiration française, les faïences sévillanes et les arcades des missions californiennes ouvertes sur un vaste jardin tropical face à la mer »).
  • 53Bercoff André, op. cit., p. 135-139 et Bouaziz Franck, « Jérusalem-Des chambres à part », Libération, 7-8 mars 2020, p. 52-53 (traite aussi de l’American Colony).
  • 54 L’un des films les spectaculaires des années 20 est, en 1921, Folies de femmes d’Eric von Stroheim, qui a pour cadre le casino et les palaces de Monte-Carlo, reconstitués à Hollywood : voir Miles, Jonathan, Once upon a Time World, op. cit., p. 239.
  • 55Voyages, op. cit., p. 269.
  • 56Rien que la Terre, Paris, Les Cahiers rouges, 2000 [éd. orig. 1928], citations p. 198 à 202.
  • 57 Il apprécie néanmoins les grands hôtels et a contribué à la fortune littéraire du Plaza de New York, sans y avoir résidé : voir Satow Julie, The Plaza, op. cit., p. 65-68.
  • 58Girard Xavier, Les années Fitzgerald- La Côte d’Azur 1920-1930, Paris, Assouline, 2001 et Marlière Stéphane, Scott et Zelda Fitzgerald, Paris, Gallimard, Folio, 2019. À New York, ils avaient passé leur lune de miel au Biltmore et été expulsés du Commodore : voir p. 123-126. Dans son livre de souvenirs, La Belle vie (The Best Times), John Dos Passos évoque un déjeuner avec le couple au Plaza, en octobre 1922 : voir les p. 197-199 de la réédition L’Imaginaire, Paris, Gallimard, 2003, avec la description suivante : « À l’intérieur, l’épaisse moquette était moelleuse sous le pied. Dans la boutique du fleuriste, les fleurs ressemblaient à des billets de dix dollars or. Une bouffée de parfum de luxe me vint de la boutique du coiffeur quand je me dirigeai vers l’ascenseur ; je ressentis une nausée passagère. J’étais aussi sensible qu’un chien à certaines odeurs. Les boutons de l’uniforme du liftier étincelaient comme des souverains d’or. » (p.197, traduction de Coindreau, M.-E. et Richard, M.).
  • 59Miles Jonathan, Once upon a Time Word…, op. cit., p. 197-200.
  • 60 Son propriétaire alsacien dans le roman.
  • 61 Que Jacques Henri Lartigue, qui l’a fréquenté à partir de 1917 et surtout des années 1920 (il connaissait aussi le Normandy de Deauville) a photographié : voir Toulier Bernard, Jacques Henri Lartigue – Un dandy à la plage, Paris, Carré, 2016, p.60-69 et Campbell Alexandra, Hôtel du Cap-Eden Roc, op.cit, p. 106-107.
  • 62 Voir le tome 2 de Fitzgerald Francis Scott, Romans, nouvelles et récits, Paris, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 2012 : Tendre et la nuit, traduit de l’anglais par Jaworski Philippe, notamment p. 207, 399-400, 445, 531-532 et note 1, p. 1582.
  • 63 La chambre de celui de Monte-Carlo, évoqué p. 531-532, est « typiquement méditerranéenne, presque monacale, presque propre, obscurcie par le scintillement de la mer. »
  • 64 Voir www.bellesrives.com [consulté le 15 mars 2024], ainsi que Neuhoff Éric, « Scott et Zelda Fitzgerald, un peu de bonheur à Juan-les-Pins », Le Figaro, 20 juillet 2022, p. 21 (troisième article de la série « La Riviera, terre d’écrivains »).
  • 65 Voir Romans, nouvelles et récits, op. cit., tome II, p. 918 et 938-939. Mazzeo Tilar J. place en épigraphe d’un des chapitres de son livre sur le Ritz une citation comportant ces mots évocateurs « (…) the stillness in the Ritz bar was strange and portentous » : The Hotel…, op. cit., p. 49.
  • 66 Il existe à Lodz un Hôtel Savoy datant de 1912.
  • 67Hotel Savoy, traduction de F. Bresson Paris, Gallimard, coll. « l’Imaginaire », 1981.
  • 68Ibid., notamment p. 45-46 et p. 164.
  • 69Magris Claudio, Loin d’où ? – Joseph Roth et la tradition juive-orientale (Einaudi, 1971, sous le titre Lontano da dove ? Joseph Roth e la tradizione ebraico-orientale), traduction française de Pastureau Jean et Pastureau Marie-Noëlle, Paris, Seuil, 2009, p. 58. Voir aussi Rilling Stéphane :« Hotel Savoy : les sensations du retour », Cahiers de l’Herne-Joseph Roth, 2015, p. 113-118 (qui trouve le propos de Claudio Magris quelque peu pessimiste).
  • 70 Claudio Magris fait aussi référence p. 65 au livre posthume de Franz Kafka, L’Amérique, et à son chapitre sur « L’Hôtel Occidental », qui relève d’ailleurs d’un autre contexte d’écriture, avant la Grande Guerre.
  • 71Ibid., p. 65.
  • 72 « Arrivée à l’hôtel », Frankfurter Zeitung, 19 janvier 1929, dans Automne à Berlin, Paris, La Quinzaine littéraire-Vuitton, p. 192, traduction de Casanova Nicole ; voir aussi les articles suivants du recueil, « Le Patron », 20 février 1929 et « Adieu à l’hôtel » (24 février 1929).
  • 73Gruber Eckhard, « Weder Adlon noch Eden – sondern Ullsteinhaus, dritter Stock- Die Entstehung von Vicki Baum Bestseller “Menschen im Hotel””, dans Seger Cordula, Wittmann Reinhard G. (hrsg.), Grand Hotel, op. cit., p. 110-111.
  • 74Kerr Philip, dans Hotel Adlon, rend compte bien plus tard de l’atmosphère oppressante de Berlin après l’établissement du nazisme :  Paris, Livre de Poche, 2017, p. 11-427. Selon une approche différente, voir aussi le documentaire cité d’Arte sur l’hôtel : Hitler et les nazis lui préfèrent le Kaiserhof, mais une partie de l’hôtel est loué par le bureau des affaires étrangères du parti nazi. Par ailleurs, lors des jeux olympiques de Berlin, en 1936, le Comité olympique s’y installe.
  • 75Grand Hôtel, traduction de G. et R. Baccara, Paris, Phébus, 1997 [éd. orig. 1929], p. 19.
  • 76Ibid., p. 10.
  • 77Ibid., p. 312.
  • 78 Y compris en termes de concurrence, notamment au détriment des « palaces des collines » vieillissants, au profit du bord de mer et de la Riviera italienne. Le maire de la ville, Jean Médecin, lance une « politique de prestige », axée notamment sur le Palais de la Méditerranée, mais le tourisme de luxe est à nouveau affecté par la crise : voir Schor Eliane, étude citée, p. 113-114.
  • 79 Dans le Piémont, avec le développement de la station de Sestrières, voulu par la famille Agnelli et par le régime mussolinien. L’établissement le plus connu est le Grand Hotel Principi di Piemonte, nom également donné, quelques années plus tard, à un hôtel de Turin inauguré en 1936.
  • 80 Le Georgian Hotel de Santa Monica date de 1933: voir Koval Wally, Accidentally Wes Anderson, op. cit., p. 10-11.
  • 81 L’hôtel Saint-Georges, premier établissement de luxe à Beyrouth, construit par Antoun Tabet, un élève d’Auguste Perret, est inauguré en 1934 : voir KASSIR Samir, Histoire de Beyrouth, Paris, Tempus, 2012, p. 401.
  • 82 Dont la situation politique est marquée dans les années 1930 par une orientation de plus en plus autoritaire et impérialiste. En 1934, ouvre le Sapporo Grand Hotel, premier établissement de ce type à Hokkaido : voir le Guide Vert Michelin Japon, 2023, p. 517.
  • 83 En Chine, le Park Hotel, dû à l’architecte tchécoslovaque Ladislas Hudec, est inauguré le 20 octobre 1934. Avec ses 86 mètres de hauteur, c’est le « premier véritable gratte-ciel de Chine et d’Asie orientale » : voir Bergère Marie-Claire, Histoire de Shanghai, op. cit., p. 262 (citation) et Lee Leo Ou-Fan, étude citée, p. 468 (des milliers de Chinois ont pris part à l’inauguration) et, dans le même ouvrage, Delaude-Liu Natalie, « De la technologie aux Arts Déco », p. 387-388(citation).
  • 84Mille monuments du XXe siècle en France, op. cit., p. 355, Bony Anne, « Un hôtel presque particulier », dans Hôtel Métropole, loc. cit., p. 94 et Delorme Franck, « Du grand hôtel au village-club » : l’hôtel est un « lieu de villégiature pour intellectuels et artistes (..) la chambre se réduit à une cellule de monastère au profit de la communion avec la nature et de la vie au soleil » (p. 170).
  • 85 Voir la brochure citée de l’Hôtel Impérial Palace d’Annecy.
  • 86Satow Julie, The Plaza, op. cit., p. 97. Si le Grill Room a fermé, la fin de la prohibition suscite la création d’un night-club dans la « Persian room », devenu un des hauts lieux de la « Cafe Society » : voir p. 98-102. Celle-ci est aussi évoquée au sujet de l’Hotel Algonquin, avec Dorothy Parker et Robert Benchley : voir le Guide Rouge Michelin de New York, 2006, p. 438. Cet établissement, au temps de la prohibition, est le cadre du roman policier de Murphy, J.J., L’Affaire de la Belle Évaporée, traduction de Sarda Yves, Paris, Rivages, 2022 (l’édition originale, A Friendly Game of Murder, date de 2012).
  • 87Tessier Alexandre, Le Grand Hôtel, op. cit., p. 292-298 (éléments comparatifs avec d’autres établissements).
  • 88Jacoberger-Lavoué Virginie, « Et le « Copa » … », article cité, p. 53.
  • 89 Joan Didion écrit : « En 1931, le fils du président Hoover fit un séjour au Royal, s’amusa follement, pêcha trente-huit poissons au large de la côte Kona de Hawaï, et se fit photographier sur la plage du Royal en train de serrer la main du surfeur Duke Kahanamoku » (L’Amérique, op.cit, p. 313). Dans un genre différent, mentionnons, la description située vers le milieu des années 1930 d’un luxueux hôtel – non nommé – où a lieu une réception de mariage, non loin de de Chicago : voir Bellow Saul, Les aventures d’Augie March, traduction de M. Lederer, Paris, Folio, 1953, p. 410-412, (l’accent est mis sur le luxe, le « confort soyeux » et la modernité des installations, incluant d’« énormes climatiseurs »).
  • 90La Treizième heure, réédition citée, p. 42 et 73.
  • 91Actes relatifs à la mort de Raymond Roussel, Paris, Allia, 2022, 61 p.
  • 92 Alexandre Tessier relève que dans la plupart des cas, le nombre des employés d’hôtels de prestige a sensiblement diminué de 1932 à 1936 : voir « De l’euphorie à la morosité », dans Pension complète!, op. cit., p. 131.
  • 93Le Piéton de Paris, op. cit., p. 189-190.
  • 94Dans la Dèche à Paris et à Londres,1935 [Down and out in Paris and London, 1933 en anglais, 1935 en français], raduit de l’anglais par M. Pétris, Paris, 10/18, 2001, p. 96.
  • 95Ibid., p. 82.
  • 96 Le premier à disparaître est le Regina, vendu aux enchères en 1934, suivi du Majestic, transformé en appartements, et du Grand Hôtel de Cimiez, qui devient une maison de retraite en 1938 : voir Schor Eliane, étude citée, p. 118-119. En revanche, un établissement moins spectaculaire, connu pour ses belles vues sur la mer, a ouvert en 1936 : il s’agit de l’hôtel La Pérouse, qui a fait l’objet d’une rénovation récente : voir Alberti Jean-Michel de, « La Pérouse », l’écrin secret de la baie des Anges », Les Échos Week-End, 1er- 2 septembre 2023, p. 74.
  • 97Delorme Franck, étude citée, p. 171 et Larique Bernard, « Le tourisme sur la Côte d’Azur durant les années 1900-1939 : processus, résultats et limites de l’organisation d’un secteur socio-économique », dans Pelletier Monique et Bergès Louis (dir.), Voyages en Méditerranée de l’Antiquité à nos jours, Actes du 128e Congrès nationale des Sociétés historiques et scientifiques, Paris, Éditions du CTHS, 2008, notamment p. 254 au sujet des palaces de Cannes.
  • 98 Voir les analyses de Zytnicki Colette dans L’Algérie terre de tourisme, op. cit., p. 121-131, ainsi que les p.160-183 sur les hôtels et le tourisme au Sahara durant l’entre-deux-guerres.