Ayant subi deux guerres mondiales et la crise des années 1930, de manière il est vrai inégale selon les pays, l’hôtellerie de luxe conserve néanmoins nombre de ses lieux emblématiques, y compris dans des capitales européennes, telles que Paris ou Londres. Certes, des établissements ont fermé, car ils étaient trop endommagés ou peu rentables. Au fur et à mesure que commence, du moins dans les pays industrialisés, ce que Jean Fourastié a appelé plus tard les Trente Glorieuses, se pose la question du rôle des grands hôtels et de leur passage à la « modernité ». Cette notion quelque peu galvaudée peut en partie renvoyer à l’héritage du mouvement moderne en termes d’architecture. Le dépouillement des formes, sans se substituer à ce qui demeure des palaces « Belle Époque » ou « Arts déco », caractérise des grands hôtels de type nouveau, souvent en relation avec des chaînes hôtelières1 et le développement du tourisme d’affaires. La modernité tient aussi à l’aménagement des espaces intérieurs et à de nouveaux stéréotypes. Si elle est aussi associée au regain du tourisme de loisir, il ne s’agit que d’une partie fort minoritaire de ce dernier, lorsqu’il trouve sa place dans de grands hôtels. Avant la fin des années 1980, la notion de mondialisation n’est pas très présente. C’est surtout dans les pays occidentaux qu’anciens et nouveaux pôles coexistent, avec, en termes d’images, la place des hôtels fréquentés par des « stars », notamment dans le cadre des stations balnéaires et des festivals. Pour rendre compte d’une période de quatre décennies, englobant aussi les débuts de la crise au milieu des années 1970 et les années 1980, souvent présentées – avec certains de ses prolongements lors de la décennie suivante – comme clinquantes, voire tapageuses, en matière de luxe, une approche chronologique sera une nouvelle fois retenue, en relation avec la conjoncture, les lieux, les clientèles et les styles. Ces derniers, notons-le, sont désormais parfois décriés, même si l’on « redécouvre » des designers prestigieux, en relation avec des expositions (Gio Ponti). Il y a à cela, on y reviendra, des raisons diverses, entre inadéquation du modernisme à la tradition des grands hôtels et décri d’une forme de post-modernisme quelque peu boursouflée.