Show cover
Couverture de Philosophie et religion. Nouvelles approches Show/hide cover

L’Épicure de Friedrich Nietzsche au prisme de l’apollinien et du dionysiaque

L’œuvre de Nietzsche est semée de part en part de références, concepts réappropriés, métaphores et d’un langage religieux ou proto-religieux. Cette influence religieuse se fait sentir en particulier à travers la réappropriation d’éléments de la religion grecque, notamment l’interprétation qu’il tire d’Apollon et de Dionysos, mais également à travers la lecture qu’il peut avoir de la théologie épicurienne, dont il se sert en partie pour forger le concept d’Übermensch. Les liens entre les écoles de pensée grecques tardives et la formation de la philosophie de Nietzsche font l’objet depuis quelques années d’un regain d’intérêt dans le cadre des études nietzschéennes. Notre objet sera ici de tenter de rendre compte, à partir de l’étude de certains concepts, du dialogue ponctuel mais régulier que Nietzsche entretient avec certains cadres de pensée issus de la religion, de la mythologie grecque ancienne et des pensées grecques tardives dans la structuration de sa pensée, et ce, du début jusqu’à la fin de son œuvre. En effet, si l’attitude de Nietzsche à l’égard de la religion – chrétienne, en particulier – est souvent méfiante quand elle n’est pas totalement hostile, il n’en puise pas moins à la source des mythes et aspects religieux de la Grèce, qu’il s’agisse de relectures de la signification de certaines divinités (Apollon et Dionysos) ou de la réinterprétation de certaines théologies philosophiques (les dieux dans l’épicurisme). Nous défendons l’idée que, suivant le prisme de la filiation entre la conceptualisation du surhumain et la place des dieux chez Épicure, les apports du penseur grec permettent d’éclairer certains aspects centraux de la philosophie de Nietzsche ainsi que son rapport à la religion et au religieux, d’une part, et que, d’autre part, il existe dans la relation de Nietzsche à Épicure un fil conducteur, une certaine continuité, en opposition à la scission que certains commentateurs ont pu établir (Ansell-Pearson, 2014 ; Choulet, 1998). Notre objectif sera ici de montrer à partir de l’étude de ces deux thématiques que bien des aspects de la religion grecque font l’objet de relectures nietzschéennes et constituent des éléments centraux de sa pensée.

Une compréhension de la relation entre Nietzsche et Épicure à l’aune de la dyade apollinien/dionysiaque

Le traitement de la figure d’Épicure dans l’œuvre de Nietzsche est pour le moins ambivalent. Si le penseur du Jardin figure au rang des philosophes que Nietzsche juge dignes d’intérêt et de dialogue dans un paragraphe d’Humain, trop humain (Nietzsche, 2019b, § 408) au côté de Montaigne, penseur influencé par les écoles stoïcienne et sceptique, il fait également l’objet de vives critiques. Il y a dans l’épicurisme une exigence de vivre en accord avec la nature, cela se faisant par le biais de « l’exercice des tendances vitales réelles » (d’après Escoubas, 1967, p. 165). La méthode pour acquérir cet accord se fait chez les épicuriens par la recherche du plaisir. Les passions sont vécues sur un mode négatif dans la mesure où l’εὐδαιμονία, la forme de bonheur visée, est ἀταραξία, c’est-à-dire absence de troubles de l’âme. L’épicurien obéit à un principe d’économie des désirs, et par là, tente de se conformer à la nature. Nietzsche évoque le bonheur épicurien dans le Gai savoir,en ces termes :

Épicure. – Oui, je suis fier de sentir le caractère d’Épicure autrement, peut-être, que tout autre, et de savourer dans tout ce que j’entends et lis de lui le bonheur de l’après-midi de l’Antiquité : – je vois son œil contempler une vaste mer blanchâtre, par-dessus les rochers de la côte sur lesquels repose le soleil pendant que des animaux petits et grands jouent dans sa lumière, sûrs et tranquilles comme cette lumière et cet œil lui-même. Seul un être continuellement souffrant a pu inventer un tel bonheur, le bonheur d’un œil face auquel la mer de l’existence s’est apaisée, et qui désormais ne peut plus se rassasier de contempler sa surface et cette peau marine chamarrée, délicate, frémissante : jamais auparavant il n’y eut une telle modestie de la volupté. (Nietzsche,2007,§45)

Ce bonheur se voit donc assimilé à l’idée d’une mer calme et sans remous, ce qui peut entrer en cohérence avec l’ἀταραξία définie comme simple absence de troubles de l’âme. André-Jean Festugière parle du fait que l’épicurien « ne recherche rien d’autre que l’égalité d’âme, une sérénité pareille à la mer tranquille (galénismos, issu de γαλήνη) » (1997, p. 11). Ce premier niveau de lecture ne semble pas souffrir de contradiction particulière. L’interprétation classique et littéralement fidèle à ce qu’écrit Nietzsche est qu’Épicure, ayant atteint un âge avancé – il s’agit bien d’un « bonheur de l’après-midi de l’Antiquité » –, se pose devant cette mer calme, sans plus de désir de la naviguer parce qu’il a atteint une certaine sérénité, peut-être même l’ἀταραξία. On peut interpréter cet aspect de l’évocation par Nietzsche d’Épicure dans le cadre du modèle dual que propose Nietzsche en premier lieu dans la Naissance de la tragédie. Il y développe une grille à l’aune de deux figures divines grecques porteuses d’une symbolique importante : Apollon et Dionysos. La pulsion apollinienne est celle qui se rattache au domaine du rêve et de la belle représentation. La conceptualisation de l’apollinien s’articule en trois étapes chez Nietzsche : la production de belles apparences ; la mise à distance et « conscientisation » du caractère onirique du rêve, et enfin dans une dernière étape le plaisir dans la contemplation des apparences. Nous pouvons retranscrire ces trois étapes à la lumière du § 45 du Gai savoir et cela peut nous permettre d’éclairer la vision que Nietzsche a d’Épicure et ce qu’il peut en tirer pour sa propre pensée. Tout d’abord, la question de la production des belles apparences nous permet d’envisager Épicure contemplant cette mer calme dont Nietzsche parle.

Le sage de Samos serait alors dans la contemplation d’un bonheur calme et stable qu’il a construit sur une longue durée et qu’il se permet d’admirer au soir de sa vie. Le bonheur de surface que le penseur s’est forgé est donc à portée de regard et tout en témoigne dans la description (les animaux autour, la lumière, la mer, le regard posé sur le panorama). Mais c’est la deuxième étape du raisonnement nietzschéen qui nous intéresse encore davantage ici dans la mesure où elle consiste en la mise à distance du caractère onirique de la représentation et elle permet de mettre en lien l’apollinien avec l’autre pulsion de la nature à l’œuvre dans le réel : le dionysiaque. En effet, au-delà du tableau idyllique décrit dans ce passage, l’apaisement ne s’est fait qu’au prix de beaucoup de souffrance ; sous « l’épiderme océanien bigarré » se cache quelque chose de plus tourmenté et à la belle représentation d’un bonheur en partie fantasmé vient s’adjoindre un réel chaotique fait autant de souffrances que de joies parfois violentes. La pulsion dionysiaque est celle qui est à l’origine des arts non figuratifs tels que la musique et la danse. Dionysos, au contraire d’Apollon qui préside au principe d’individuation et de délimitation, est à l’origine de l’éclatement du principe d’individuation. À partir du moment où l’on a conscience du caractère onirique de cette représentation d’une forme de bonheur, on prend au même moment conscience de la coexistence de ce bonheur-là avec une autre parcelle de réalité qu’est tout ce qui se cache sous la surface lisse et apparemment sans heurt.

Les liens entre le recours à cette métaphore complexe de l’étendue d’eau calme et sereine recouvrant un fond de réalité plus troublé sont renseignés par Nietzsche dans un fragment posthume :

Expériences psychologiques fondamentales – le nom « d’apollinien » désigne l’immobilisation ravie devant un monde inventé et rêvé, devant le monde de la belle apparence, en tant qu’il libère du devenir : est baptisé du nom de Dionysos, d’autre part, le devenir conçu activement, ressenti subjectivement, en tant que volupté furieuse du créateur qui connaît simultanément la rage du destructeur. Antagonisme de ces deux expériences et des désirs qui en constituent le fondement, le premier veut éterniser l’apparence, devant elle l’homme devient calme, sans désirs, semblable à une mer d’huile, guéri, en accord avec soi et avec toute l’existence, le second aspire au devenir, à la volupté du faire devenir, c’est-à-dire du créer et du détruire.(Nietzsche,1979,2[110])

On retrouve dans ce texte l’évocation de l’apollinien comme la représentation d’une réalité apaisée, sans plus de remous, une « mer d’huile », reprenant la métaphore du texte issu du Gai savoir. Pour autant, cette réalité de la contemplation d’un bonheur simple n’est pas incompatible avec la violence du dionysiaque. Si pour un exégète de cette question comme Keith Ansell-Pearson (2014, p. 27), « Épicure abandonne son sens du soi complètement de sorte à ce qu’il puisse s’ouvrir à la mer de l’existence, et peut-être trouve-t-on là une alternative à l’extase dionysiaque, entraînant une perte plus pacifique et moins grandiose du soi dans l’Ur-eine » (nous traduisons), selon nous, les deux réalités se chevauchent et s’entremêlent et bien que leurs fonctionnements semblent opposés, ils se conjuguent toujours. Ainsi, la volonté d’éterniser le devenir propre à l’apollinien ne dure jamais longtemps et la pulsion créatrice-destructrice du dionysiaque vient cycliquement troubler le plaisir pris aux belles apparences. On constate que ces deux pulsions et leurs fonctionnements respectifs s’imbriquent en dépit de leurs contradictions a priori. Comme l’explique Nietzsche dans un fragment de 1888 :

Au fond, Nietzsche n’a rien tenté d’autre que de deviner pourquoi précisément l’apollinisme grec devait nécessairement naître d’un soubassement dionysien : pourquoi le Grec dionysien avait besoin de devenir apollinien, c’est-à-dire de briser sa « volonté » de monstrueux, de multiple, de hasardeux et de bouleversant contre une ‘volonté’ de mesure, de simplicité, d’intégration harmonieuse dans une règle et une conception. Le démesuré, le sauvage, « l’asiatique » est le fond de son caractère : la bravoure du Grec réside dans son combat contre ce qu’il a d’asiatique : la beauté ne lui a pas été donnée, pas plus que la logique, l’évidence naturelle de la morale – elle a été conquise, voulue, arrachée de haute lutte, elle est sa victoire. (Nietzsche,1977,14[14])

Nous percevons des accents épicuriens dans cette idée de maîtrise de la nature chaotique du réel. Ceux-ci sont envisagés à partir de la liaison entre apollinien et dionysiaque, non sur le mode de la décadence et du manque de vie, mais sur celui de l’enchevêtrement de deux réalités aux fonctionnements certes a priori relativement antagoniques, en réalité complémentaires. Tout organisme semble osciller entre le dionysiaque et l’apollinien comme entre deux pôles à équilibrer constamment, entre un calme et une mesure qui seraient un danger pour la vitalité et une démesure qui peut être destructrice. Et précisément dans ce texte, Nietzsche explique que ce qui est de l’ordre de la Kultur dans son vocabulaire est ce raffinement bâti sur la base dionysiaque. On peut en fait considérer la posture d’Épicure décrite dans le § 45 du Gai savoir comme celle de l’esprit libre nietzschéen ou d’un individu qui a réussi à se glisser dans les habits d’un type d’homme supérieur, voire dans ceux du type surhumain en développant son propre corpus de valeurs à l’écart de la société de son temps et des traits d’une civilisation décadente. Cette mer observée peut également constituer une invitation à explorer la possibilité des dangers qu’elle recèle, c’est-à-dire à assumer un réel en mouvement, chaotique et participant ainsi d’une forme de fonctionnement dionysiaque. Monika Langer explique dans un ouvrage à propos de ce texte que « la description de Nietzsche est captivante, évocatrice et richement ambiguë » (2010, p. 65). De fait, elle prête à des interprétations diverses, et même dans cet apaisement au soir de sa vie, le sage épicurien, proche du dieu épicurien, regarde avec apaisement ce qui, dans le passé, fut combat et lutte contre soi-même et contre les autres afin de se déprendre de certaines illusions, au premier rang desquelles celle que la mort serait quelque chose pour les hommes. En témoignent les dernières phrases de la Lettre à Ménécée : « mais tu vivras comme un dieu parmi les hommes. Car il ne ressemble en rien à un animal mortel, l’homme vivant dans les biens immortels » (Épicure, 1994, p. 198). Il est effectivement utile de rappeler que la mort n’est rien pour un épicurien, car, « le plus terrifiant des maux, la mort, n’a donc aucun rapport avec nous, puisque précisément, tant que nous sommes, la mort n’est pas là, et une fois que la mort est là, alors nous ne sommes plus » (ibid., p. 193). La conception de la mort comme étant un calvaire n’est que la conséquence d’une assimilation illusoire de la mort à une douleur éternelle. Épicure l’analyse froidement comme l’absence de sensation, donc également absence de douleur éventuelle. Cette déconstruction d’un grand questionnement philosophique n’est pas sans rappeler celle que Nietzsche opère lui-même notamment à la faveur de la démarche généalogique, appliquée à la pitié chrétienne (en particulier dans le deuxième traité de la Généalogie de la morale). Épicure détaille son raisonnement dans la Lettre à Hérodote, un texte qui présente de manière générale sa doctrine physique. Évoquant la crainte de la mort répandue parmi ses contemporains et le trouble qui en résulte, Épicure écrit :

[e]t il tient également à ce qu’ils s’attendent toujours – ou le redoutent – à quelque chose d’éternellement terrible, en raison des mythes ou encore de l’insensibilité qu’il y a dans l’état de mort, qu’ils craignent comme si elle pouvait les atteindre, et il tient aussi au fait que ces affections sont moins dues à des opinions qu’à une disposition d’esprit irrationnelle : il s’ensuit qu’en ne définissant pas ce qui est à craindre ils [les hommes] ressentent un trouble égal à celui qu’ils auraient s’ils en formaient des opinions, ou même plus intense. (ibid., p. 172-173)

Loin de n’être qu’un simple épigone de la décadence définie par Nietzsche comme comprenant les thuriféraires d’une vie diminuée, déclinante et simplement menée en fonction d’une faible constitution, relevant d’un manque de vitalité et d’une désorganisation de la hiérarchie de pulsions qui le constitue, Épicure assume au contraire pleinement les dangers que recèle l’existence, y compris la souffrance qui y participe : « Solidement attaché au sol, Épicure regarde la mer et apprécie la possibilité de l’incertitude qu’elle offre. Littéralement et de manière figurative, il peut flotter sur la mer. […] Épicure se réjouit de la possibilité toujours présente de quitter la terre ferme pour les périls de la mer » (Langer, 2010, p. 67, nous traduisons). Le calcul des plaisirs épicurien n’est pas simple évitement de la douleur mais hiérarchisation entre certains types de plaisirs et certains types de douleurs, de la même manière qu’il y a hiérarchisation des pulsions, bien qu’elle ne soit pas purement rationnelle et consciente, dans la conception du fonctionnement physio-psychologique des individus chez Nietzsche. Il n’y aurait pas d’un côté l’attitude simplement passive et craintive d’un organisme affaibli face à une attitude affirmative, active et conquérante de l’organisme puissant : le fonctionnement des organismes et des structures physio-psychologiques que sont les individus est plus complexe. L’épicurien n’évite pas nécessairement toute douleur parce qu’elle est une douleur, il y a des douleurs utiles à l’existence et des douleurs qui recèlent un plaisir plus grand encore. La douleur est un mal dans l’absolu, mais elle peut avoir une utilité relative. En termes nietzschéens, on perçoit chez Épicure une forme de manifestation du complexe apollo-dionysiaque dans l’organisation pulsionnelle des individus. Comme l’écrit Épicure dans la Lettre à Ménécée sur la relation et le jeu qui existent entre plaisir et douleur:

[m]ais il y a des cas où nous passons par-dessus de nombreux plaisirs, chaque fois qu’un désagrément plus grand résulte pour nous de ces plaisirs ; et nous pensons que bien des douleurs sont préférables à des plaisirs, lorsqu’un plus grand plaisir s’ensuit pour nous, après avoir longtemps supporté les douleurs.(Épicure,2011,p.195)

Il convient donc de se déprendre de la vision de l’épicurisme comme simple recherche du plaisir mesuré et évitement de la douleur. La matrice épicurienne est plus complexe, et si on l’envisage selon le prisme développé par Nietzsche, en particulier dans la Naissance de la tragédie, dans la dualité entre apollinien et dionysiaque, on peut considérer que derrière la métriopathie épicurienne nous sommes face à une manifestation de l’apollinien ou à tout le moins quelque chose qui en participerait, de l’ordre de la bonne mesure dans la gestion des plaisirs et des peines ; mais de manière plus profonde, Épicure assumait fondamentalement le caractère chaotique du monde – dionysiaque, en termes nietzschéens – avec son lot d’incertitudes, de souffrances mais également de joie. Le développement de la pensée nietzschéenne s’est fait dans le sens d’une interrogation sur la question de la valeur des valeurs, avec en ligne de mire la vie même comme valeur à privilégier et l’augmentation du sentiment de puissance comme moyen privilégié d’atteindre ce but. Un commentateur (Dewitt, 1947, p. 195-201) a fait valoir contre l’idée répandue que la vie – et non le plaisir – était le bien suprême de la philosophie épicurienne. En effet, dès lors que le postulat de la dénégation de l’immortalité est posé, en contradiction avec les conceptions religieuses de l’époque, c’est la vie même qui devient la valeur suprême, la gestion du plaisir devenant une modalité de cette existence. En changeant de perspective dans le cadre de la pensée épicurienne, on peut considérer que l’objectif est, encore plus fondamentalement que la recherche du plaisir calculé comme source de l’ἀταραξία, une forme de gestion du plaisir et de la douleur dont la valeur ultime est une certaine conception de l’existence, qui fait de la philosophie une entreprise à but pratique, « la philosophie comme art de vivre »1 comme l’exprime Nietzsche à propos d’Épicure.

Une certaine analyse de la notion de plaisir chez Épicure nous permet de concevoir les liens qui peuvent exister entre le plaisir et la joie dionysiaque, telle que conceptualisée par Nietzsche. On sait qu’une distinction classique est faite par Épicure entre plaisir stable (catastématique) et instable (cinétique) (notamment reprise chez Annas, 1987, p. 5-21). Toutefois, il a pu apparaître aux yeux de certains commentateurs que cette distinction, au plan philologique, est parfois plus ténue. Nous pourrions, sinon confondre plaisir catastématique – qui est le but ultime, en tant qu’état d’absence de douleur, de l’épicurisme – et plaisir cinétique, au moins établir une certaine continuité entre les deux. Dans la Sentence vaticane 33, Épicure écrit qu’il existe trois sources de plaisir : absence de faim, de soif ou de froid (1994, p. 213). Toutefois, cela ne correspond pas à l’état de κατάστημα, l’absence de douleur qui est censée correspondre au plaisir. Celui-ci résiderait donc à la fois dans ces processus d’absence de faim, de soif ou de froid et dans l’état stable qui en résulte et qui peut aboutir à l’ἀταραξία. Autrement dit, le bonheur épicurien ne serait pas seulement un état défini négativement, à savoir par l’absence de douleur, mais serait lié aux processus de plaisir en mouvement. C’est ce qu’explique Boris Nikolsky quand il écrit :

De plus, les mots conclusifs de la citation d’Épicure – ut natura is potiens dolore careat [que la nature est exempte de douleur] – montrent définitivement qu’Épicure n’opposait pas plaisir sensoriel et absence de douleur mais au contraire, les voyait comme une unité, croyant que de tels plaisirs étaient la condition indispensable d’un ‘bon état’ de l’organisme. (Nikolsky, 2001, p. 449, nous traduisons)

Si cette frontière entre plaisir processuel et plaisir « état » est plus poreuse qu’on veut bien le reconnaître habituellement, apparaît alors un espace théorique possible pour le rapprochement de ce qui constitue la joie dionysiaque – intrinsèquement processuelle – et le plaisir épicurien. Ces réflexions sur les proximités des deux concepts nous amènent précisément à traiter du type d’homme qui éprouve la pure joie du créer et du devenir dionysiaque, à savoir le type surhumain, une catégorie conceptuelle pour laquelle Nietzsche a puisé dans la théologie épicurienne.

L’inspiration épicurienne de Nietzsche dans la conceptualisation du surhumain

La joie dionysiaque en tant qu’état éprouvé par le type surhumain rappelle la façon dont Nietzsche fait référence à la figure des dieux épicuriens. Nous pourrions établir une analogie entre ces différents termes : ce que la joie dionysiaque est au type surhumain, l’εὐδαιμονία l’est au dieu épicurien. Le surhumain (Übermensch), rappelons-le, désigne chez Nietzsche un type d’homme à élever dans le cadre de la transvaluation de toutes les valeurs. Il s’agit d’un concept essentiel de la pensée nietzschéenne. Il ne désigne pas une catégorie d’humains déjà existante mais il s’agit bien plutôt d’un horizon à atteindre par le biais d’un dressage (Züchtung) en vue de contrevenir au mouvement nihiliste de son temps. Il a bien conscience de la dimension posthume que ce projet présente. Il sait aussi son caractère aristocratique et qu’il ne pourra éventuellement advenir qu’à long terme. Il tire plusieurs idées de la conceptualisation épicurienne des dieux. Rappelons avant tout brièvement le débat existant dans l’exégèse au sujet des dieux épicuriens. Une vision réaliste estime qu’Épicure considérait les dieux comme existant réellement en dehors de nous, tandis qu’une conception idéaliste décrit les dieux comme étant des projections mentales. Cette dernière interprétation est défendue notamment par Jean Bollack (1975, p. 217 et suiv.) , qui analyse la discussion sur l’existence réelle des dieux menée dans la scolie de la maxime 1 d’Épicure et du commentaire de Cicéron dans De la nature des dieux (I, 19, 49) : elle consiste à dire que les dieux ne sont pour nous que de l’ordre du simulacre (εἴδωλον) qui touche nos organes perceptifs. Si certains textes d’Épicure – en particulier un passage de la Lettre à Ménécée (2011, p. 97-982) –nous incitent à pencher en faveur de l’interprétation réaliste de la théologie épicurienne, d’autres auteurs nous enjoignent à une certaine prudence. C’est notamment le cas de Renée Piettre : « sans doute faut-il parvenir à dépasser l’opposition, qui nous paraît irréductible, entre les dieux transcendants et dieux images. Il se pourrait que l’obstacle n’existe que dans nos propres représentations culturelles » (2005, p. 81).Pour notre sujet, quelle que soit la nature, réelle et physique, ou en tant que représentation mentale, des dieux chez Épicure, leur rôle est régulateur dans l’existence. Ils nous servent de modèle dans leur impassibilité consécutive de leur absence de troubles. Ainsi agit également le type surhumain chez Nietzsche.

Chez Nietzsche, l’individu qui incarnera le type surhumain sera celui qui saura établir une certaine distance à l’égard du monde, il aura la capacité de mettre en œuvre le pathos de la distance dont l’auteur parle notamment dans Par-delà bien et mal, cette propension « à un incessant accroissement de distance au sein de l’âme elle-même » (2000a, § 257), dimension que l’on retrouve dans la figure du dieu épicurien. Nietzsche précise encore dans un fragment posthume qu’il s’agit de l’homme « qui a suffisamment de chance et de courage pour pouvoir également se tenir à l’écart et regarder à l’écart, tel un dieu épicurien » (1979, [108]). Il s’agit en tout cas de favoriser le développement, comme il l’écrit dans le Crépuscule des idoles, d’une « volonté d’être pleinement soi, de se distinguer » (1988, § 37). On entrevoit ici l’aspect aristocratique du projet philosophique de Nietzsche. Ce dernier voit dans le type du dieu épicurien une figure qui a cette caractéristique aristocratique de savoir hiérarchiser, d’avoir une maîtrise dans la hiérarchie de pulsions qui le constitue. Ainsi, dans un fragment posthume, Nietzsche écrit-il :

I. Zarathoustra ne peut rendre heureux qu’après que la hiérarchie est établie. D’abord elle est enseignée. II. La hiérarchie poursuivie dans un système de gouvernement de la terre : les maîtres de la terre enfin, une nouvelle caste régnante. Naissant d’eux ici et là, pareil en tous points au dieu d’Épicure, le Surhomme, la transfiguration de l’existence. III. La conception surhumaine du monde. Dionysos. (Nietzsche, 1982, 35 [73])

Dans le cadre de l’avènement d’un nouveau corpus de valeurs pour remplacer les valeurs d’origine platonico-chrétienne, il s’agit pour Nietzsche d’établir une hiérarchie non seulement entre soi et autrui, dans une dimension que l’on pourrait appeler aristocratique ou oligarchique, mais encore une hiérarchie en soi en tant que structure pulsionnelle, entre les pulsions qui concourent à la promotion de la vie même en tant que valeur et les pulsions qui tendent à un abaissement de la vie. L’ultime dessein philosophique de Nietzsche, comme il le précise dans le texte, est en effet la transfiguration de l’existence. Si la figure d’Épicure lui-même passe pour être décadent, il apparaît que dans la théologie épicurienne, les dieux épicuriens représentent à la fois quelque chose du calme apollinien, de la joie dionysiaque et de ce que Nietzsche appellera le surhumain. Il juxtapose textuellement le surhumain et le dieu épicurien, montrant ainsi les accointances qui existent entre les deux. Il évoque ensuite Dionysos comme étant co-constitutif d’une conception surhumaine du monde, se mouvant dans le chaos indistinct du réel. Si l’on se réfère à un texte de Par-delà bien et mal, on peut remarquer la proximité de la figure du dieu épicurien avec certaines caractéristiques du monde dionysiaque. Dans cet aphorisme intitulé « Le vice olympien », Nietzsche évoque les dieux olympiens :

Et si l’on admet que les dieux philosophent eux aussi, ce que je suis fort porté à croire, – je ne doute pas qu’ils ne connaissent une façon de rire nouvelle et surhumaine – et aux dépens de tout ce qui est sérieux ! Les dieux sont moqueurs : il semble même qu’ils ne peuvent s’empêcher de rire aux cérémonies sacrées. (2000b, § 294)

On retrouve ici à la fois l’idée du pathos de la distance qui se manifeste à travers le rire olympien des dieux et l’idée du rire face au tragique de l’existence et à son lot de souffrances nécessaires pour faire de la vie et de l’intensification du sentiment de puissance le moteur même de l’existence. Un autre aspect emprunté par Nietzsche au concept épicurien des dieux est l’auto-référentialité de celui-ci : le surhumain, de même que le dieu épicurien, est indifférent au sort d’autrui et développe ses valeurs dans le cadre de sa propre hiérarchie pulsionnelle. Dans un fragment posthume, en parlant des individus de type surhumain à venir, Nietzsche écrit : « les uns comme les dieux épicuriens, ne se souciant pas des autres » (1997, 1 [21]), ce qui fait écho à la fin de la Lettre à Ménécée quand Épicure décrit la conséquence pour celui qui parvient à respecter les principes de l’éthique épicurienne : « jamais tu ne seras troublé, ni dans la veille ni dans les rêves, mais tu vivras comme un dieu parmi les hommes » (ibid., p. 198). Finalement, le type surhumain trouve un miroir dans la figure du dieu épicurien davantage que dans celle du simple disciple épicurien qui applique les principes éthiques dispensés par le sage de Samos.

Ces thématiques englobent également l’idéal épicurien de réclusion par rapport à la société. Cela nous ramène à l’apolitisme voire à l’antipolitisme de l’école épicurienne. Comme l’écrit Nietzsche dans ce texte issu du Gai savoir :

[V]is caché pour que tu puisses vivre pour toi, vis ignorant de ce qui importe le plus à ton époque ! Place, entre toi et aujourd’hui, au moins l’épaisseur de trois siècles. […] Et, toi aussi, tu voudras secourir, mais seulement ceux dont tu comprends entièrement la peine, puisqu’ils ont avec toi une joie, et un espoir, en commun – tes amis et seulement à la façon dont tu te prêtes secours à toi-même : – je veux les rendre plus courageux, plus endurants, plus simples et plus joyeux ! Je veux leur apprendre ce qu'aujourd'hui si peu de gens comprennent, et ces prédicateurs de la compassion moins que personne : - non plus la peine commune, mais la joie commune ! (ibid., §338)

La réclusion est autant spatiale (λάθε βιώσας, autrement dit l’injonction de vivre caché, avec l’idéal du Jardin) qu’intellectuelle. Lorsque Nietzsche enjoint le lecteur à placer entre lui et le monde qui lui est contemporain « l’épaisseur de trois siècles », il s’agit bien en quelque sorte de se rendre inactuel dans le sens où les contingences propres à une époque ne doivent pas le détourner des buts et des valeurs qu’il s’assigne. Tel le dieu épicurien, le représentant du type surhumain est indifférent au sort de ses contemporains. Dans le cadre de la construction de ses valeurs propres, il ne peut vivre dans le monde comme la majorité et souscrire à ses valeurs, qui peuvent être décadentes, selon le regard de Nietzsche sur les sociétés politiques de son temps en Europe.

S’il n’est pas question de traiter ici de la thématique de la décadence d’Épicure dans la pensée de Nietzsche et de son éventuel caractère préchrétien, qui constitue pour certains exégètes un terme dans l’analyse de la relation entre ces deux pensées, les concepts que nous avons pu étudier nous renseignent néanmoins déjà sur l’importance de la pensée d’Épicure en tant qu’infrastructure de celle de Nietzsche et sur sa portée continue dans la pensée de celui-ci. Il est également à noter que cette approche de l’œuvre du penseur allemand permet de rendre compte de la relation complexe entre les pulsions apollinienne et dionysiaque, couple de divinités et de concepts à l’origine de l’œuvre de Nietzsche avec la Naissance de la tragédie en 1872 et reprenant force dans la dernière partie de son œuvre, en en faisant un cadre d’analyse complet du réel. La figure des dieux épicuriens permet à Nietzsche de parachever son projet philosophique de renversement des valeurs (Umwertung aller Werte), d’affirmation de l’existence, d’édification d’un nouveau type humain et montre la prédominance d’un cadre de pensée infusé par les références religieuses pour forger ses concepts centraux, dans des écrits de structure aphoristique et fragmentaire, et néanmoins cohérents.

Bibliographie

Annas Julia, 1987, « Epicurus on Pleasure and Happiness », Philosophical Topics, vol. 15, n° 2, p. 5‑21.

Ansell-Pearson Keith, 2014, « Heroic-Idyllic Philosophizing: Nietzsche and the Epicurean Tradition », Royal Institute of Philosophy Supplements, n° 74, p. 1‑34.

Ansell-Pearson Keith, 2018, « When wisdom assumes bodily form: Marx and Nietzsche on Epicurus », dans Dries Manuel (ed.), Nietzsche on Consciousness and the Embodied Mind, De Gruyter, p. 309‑328.

Bertino Andrea C., 2008, « Nietzsche und die hellenistische Philosophie. Der Übermensch und der Weise », Nietzsche Studien, 36, no 1, p. 96‑130.

Bollack Jean, 1975, La Pensée du plaisir: Épicure : textes moraux, commentaires, Paris, Éditions de Minuit.

Bornmann Fritz, 1984, « Nietzsches Epikur », Nietzsche Studien, 13, p. 177‑188.

Bett Richard, 2005, « Nietzsche, the Greeks, and Happiness (with Special Reference to Aristotle and Epicurus) », Philosophical Topics, 33, no 2, p. 45‑70.

Choulet Philippe, 1998, « “L’Épicure” de Nietzsche : une figure de la décadence », Revue philosophique de la France et de l’Étranger, 188, no 3, p. 311‑330.

Delattre Daniel et Pigeaud Jackie (dirs), 2010, Les épicuriens, Paris, Gallimard, collection « Bibliothèque de la Pléiade ».

Dewitt Norman W., 1947, « Epicurus: Philosophy for the Millions », The Classical Journal, vol. 42, no 4, p.195‑201.

Épicure, 1994, Lettres, Maximes, Sentences, trad. du grec et édité par J.-F.  Balaudé, Paris, Le Livre de poche.

Épicure, 2011, Lettres, maximes et autres textes, trad. du grec par P.-M. Morel, Paris, Garnier Flammarion.

Escoubas Éliane, 1967, « Ascétisme stoïcien et ascétisme épicurien », Les Études philosophiques, 22, no 2, p. 163‑172.

Festugière André-Jean, 1997, Épicure et ses dieux, Paris, Presses universitaires de France.

Gigandet Alain et Morel Pierre-Marie (dirs), 2007, Lire Épicure et les épicuriens, Paris, Presses universitaires de France.

Guibal Francis, 1986, « Un divin pluriel ? Monothéisme et polythéisme chez Nietzsche », Revue des sciences philosophiques et théologiques, vol. 70, no 3, p. 393‑409.

Langer Monika M., 2010, Nietzsche’s Gay Science. Dancing Coherence, Palgrave Macmillan.

Luyster Robert, 2001, « Nietzsche/Dionysus: Ecstasy, Heroism, and the Monstrous », Journal of Nietzsche Studies, no 21, p. 1‑26.

Nietzsche Friedrich, 1968-1997, Œuvres philosophiques complètes, 28 tomes, Paris, Gallimard.

Nietzsche Friedrich, 1980a, Aurore. Pensées sur les préjugés moraux suivi de Fragments posthumes (Début 1880-Printemps 1881), trad. de l’allemand par J. Hervier et édité par Mazzino Montinari et Giorgio Colli, Paris, Gallimard.

Nietzsche Friedrich, 1980b, Sämtliche Werke, kritische Studienausgabe, Munich-Berlin-New York, DTV-Walter de Gruyter, 15 vols.

Nietzsche Friedrich, 1988, Crépuscule des idoles ou Comment philosopher à coups de marteau. trad. de l’allemand par J.-C. Hémery et édité par G. Colli et M. Montinari, Paris, Gallimard, collection « Folio ».

Nietzsche Friedrich, 1990, L’Antéchrist – Ecce Homo, trad. de l’allemand par J.-C. Hémery et édité par G. Colli et M. Montinari, Paris, Gallimard, collection « Folio ».

Nietzsche Friedrich, 2000a, Éléments pour la généalogie de la morale, trad. de l’allemand par P. Wotling, Paris, Librairie générale française.

Nietzsche Friedrich, 2000b, Par-delà bien et mal, trad. de l’allemand par P. Wotling, Paris, Flammarion, collection « GF ».

Nietzsche Friedrich, 2007, Le Gai savoir, trad. de l’allemand par P. Wotling, Paris, Flammarion, collection « GF ».

Nietzsche Friedrich, 2019a, Humain, trop humain 1, trad. de l’allemand par P. Wotling, Paris, Flammarion, collection « GF ».

Nietzsche Friedrich, 2019b, Humain, trop humain 2, trad. de l’allemand par É. Blondel, O. Hansen-Løve et T. Leydenbach, Paris, Flammarion, collection « GF ».

Nikolsky Boris, 2001, « Epicurus on Pleasure », Phronesis, vol. 46, no 4, p. 440‑465.

Piettre Renée, 2005, Comment peut-on être dieu? La secte d’Épicure, Paris, Belin, collection « L’Antiquité au présent ».

Porter J. I., 2020, « Epicurus in Nineteenth-Century Germany: Hegel, Marx, and Nietzsche », Oxford Handbook of Epicurus and Epicureanism, Oxford, Oxford University Press.

Roos Richard, 1980, « Nietzsche et Épicure : l’idylle héroïque », Revue d’Allemagne et des pays de langue allemande, 12, n° 4, p. 497‑546.

Sève Bernard, 2010, Mortalité et immortalité de Dieu, Paris, Presses universitaires de France, collection « Philosopher ».

Vincenzo Joseph P., 1994, « Nietzsche and Epicurus », Continental Philosophy Review, 27, no 4, p. 383‑397.

  • 1 Voir Nietzsche, 1980b, 9 [57]. Nous traduisons « Kunst des Lebens » par art de vivre mais nous pourrions également transcrire ce fragment en « art de la vie », plus fidèle littéralement au texte original et qui souligne la dimension de création de soi qui est très présente dans la pensée nietzschéenne. Ce passage est traduit, dans l’édition citée, par « art de la vie ».
  • 2 Au début de la Lettre à Ménécée, il est écrit : « En premier lieu, considérant que le dieu est un vivant incorruptible et bienheureux, ainsi que la notion commune du dieu en a tracé l’esquisse, ne lui ajoute rien d’étranger à son incorruptibilité, ni rien d’inapproprié à sa béatitude. En revanche, tout ce qui peut préserver en lui la béatitude qui accompagne l’incorruptibilité, juge que cela lui appartient. Car les dieux existent. Évidente est en effet la connaissance que l’on a d’eux ». D’après la traduction de ce passage de la Lettre, l’existence – et donc la thèse réaliste concernant la théologie épicurienne – semble attestée par la lettre d’Épicure lui-même.
  • Bibliographie

    Annas Julia, 1987, « Epicurus on Pleasure and Happiness », Philosophical Topics, vol. 15, n° 2, p. 5‑21.
    Ansell-Pearson Keith, 2014, « Heroic-Idyllic Philosophizing: Nietzsche and the Epicurean Tradition », Royal Institute of Philosophy Supplements, n° 74, p. 1‑34.
    Ansell-Pearson Keith, 2018, « When wisdom assumes bodily form: Marx and Nietzsche on Epicurus », dans Dries Manuel (ed.), Nietzsche on Consciousness and the Embodied Mind, De Gruyter, p. 309‑328.
    Bertino Andrea C., 2008, « Nietzsche und die hellenistische Philosophie. Der Übermensch und der Weise », Nietzsche Studien, 36, no 1, p. 96‑130.
    Bollack Jean, 1975, La Pensée du plaisir: Épicure : textes moraux, commentaires, Paris, Éditions de Minuit.
    Bornmann Fritz, 1984, « Nietzsches Epikur », Nietzsche Studien, 13, p. 177‑188.
    Bett Richard, 2005, « Nietzsche, the Greeks, and Happiness (with Special Reference to Aristotle and Epicurus) », Philosophical Topics, 33, no 2, p. 45‑70.
    Choulet Philippe, 1998, « “L’Épicure” de Nietzsche : une figure de la décadence », Revue philosophique de la France et de l’Étranger, 188, no 3, p. 311‑330.
    Delattre Daniel et Pigeaud Jackie (dirs), 2010, Les épicuriens, Paris, Gallimard, collection « Bibliothèque de la Pléiade ».
    Dewitt Norman W., 1947, « Epicurus: Philosophy for the Millions », The Classical Journal, vol. 42, no 4, p.195‑201.
    Épicure, 1994, Lettres, Maximes, Sentences, trad. du grec et édité par J.-F.  Balaudé, Paris, Le Livre de poche.
    Épicure, 2011, Lettres, maximes et autres textes, trad. du grec par P.-M. Morel, Paris, Garnier Flammarion.
    Escoubas Éliane, 1967, « Ascétisme stoïcien et ascétisme épicurien », Les Études philosophiques, 22, no 2, p. 163‑172.
    Festugière André-Jean, 1997, Épicure et ses dieux, Paris, Presses universitaires de France.
    Gigandet Alain et Morel Pierre-Marie (dirs), 2007, Lire Épicure et les épicuriens, Paris, Presses universitaires de France.
    Guibal Francis, 1986, « Un divin pluriel ? Monothéisme et polythéisme chez Nietzsche », Revue des sciences philosophiques et théologiques, vol. 70, no 3, p. 393‑409.
    Langer Monika M., 2010, Nietzsche’s Gay Science. Dancing Coherence, Palgrave Macmillan.
    Luyster Robert, 2001, « Nietzsche/Dionysus: Ecstasy, Heroism, and the Monstrous », Journal of Nietzsche Studies, no 21, p. 1‑26.
    Nietzsche Friedrich, 1968-1997, Œuvres philosophiques complètes, 28 tomes, Paris, Gallimard.
    Nietzsche Friedrich, 1980a, Aurore. Pensées sur les préjugés moraux suivi de Fragments posthumes (Début 1880-Printemps 1881), trad. de l’allemand par J. Hervier et édité par Mazzino Montinari et Giorgio Colli, Paris, Gallimard.
    Nietzsche Friedrich, 1980b, Sämtliche Werke, kritische Studienausgabe, Munich-Berlin-New York, DTV-Walter de Gruyter, 15 vols.
    Nietzsche Friedrich, 1988, Crépuscule des idoles ou Comment philosopher à coups de marteau. trad. de l’allemand par J.-C. Hémery et édité par G. Colli et M. Montinari, Paris, Gallimard, collection « Folio ».
    Nietzsche Friedrich, 1990, L’Antéchrist – Ecce Homo, trad. de l’allemand par J.-C. Hémery et édité par G. Colli et M. Montinari, Paris, Gallimard, collection « Folio ».
    Nietzsche Friedrich, 2000a, Éléments pour la généalogie de la morale, trad. de l’allemand par P. Wotling, Paris, Librairie générale française.
    Nietzsche Friedrich, 2000b, Par-delà bien et mal, trad. de l’allemand par P. Wotling, Paris, Flammarion, collection « GF ».
    Nietzsche Friedrich, 2007, Le Gai savoir, trad. de l’allemand par P. Wotling, Paris, Flammarion, collection « GF ».
    Nietzsche Friedrich, 2019a, Humain, trop humain 1, trad. de l’allemand par P. Wotling, Paris, Flammarion, collection « GF ».
    Nietzsche Friedrich, 2019b, Humain, trop humain 2, trad. de l’allemand par É. Blondel, O. Hansen-Løve et T. Leydenbach, Paris, Flammarion, collection « GF ».
    Nikolsky Boris, 2001, « Epicurus on Pleasure », Phronesis, vol. 46, no 4, p. 440‑465.
    Piettre Renée, 2005, Comment peut-on être dieu? La secte d’Épicure, Paris, Belin, collection « L’Antiquité au présent ».
    Porter J. I., 2020, « Epicurus in Nineteenth-Century Germany: Hegel, Marx, and Nietzsche », Oxford Handbook of Epicurus and Epicureanism, Oxford, Oxford University Press.
    Roos Richard, 1980, « Nietzsche et Épicure : l’idylle héroïque », Revue d’Allemagne et des pays de langue allemande, 12, n° 4, p. 497‑546.
    Sève Bernard, 2010, Mortalité et immortalité de Dieu, Paris, Presses universitaires de France, collection « Philosopher ».
    Vincenzo Joseph P., 1994, « Nietzsche and Epicurus », Continental Philosophy Review, 27, no 4, p. 383‑397.