La marque « Pays Cathare » est une des plus anciennes marques de territoire, revendiquée comme telle par un dépôt à l’Inpi (Institut national de la propriété industrielle) et la mise en place dès 1991 d’une démarche de marketing territorial avec la promotion d’une offre de destination (Garcia et Genieys, 2005). Cette initiative du département de l’Aude a été relancée en 2011 dans un processus de réécriture intitulé Acte II, demain le Pays cathare, destiné à redessiner les grandes lignes d’une(re)valorisation culturelle et d’une qualification de l’offre touristique associée à une marque commerciale.
À partir d’une première enquête menée sur une double application numérique racontant les racines historiques du territoire (Châtelet et al., 2020), le corpus de documents rassemblés a été enrichi d’entretiens semi-directifs avec des élus, des responsables de sites touristiques et des acteurs du développement territorial et de la valorisation du patrimoine du département de l’Aude. L’analyse de ces contenus (documents et discours) a rendu possible le repérage de l’impact du renouvellement de la mise en récit de ce Pays cathare dont le rayonnement médiatique a créé un hiatus entre tourisme et culture. L’approche culturelle du territoire semble alors souffrir de son appellation et de cette référence au catharisme. Sa réinvention oriente-t-elle le Pays cathare vers un renforcement des enjeux économiques dont la marque commerciale était censée être un pilier important ? Le mot cathare est-il définitivement disqualifié dans une approche patrimoniale qui se veut plus proche d’un discours scientifique complexe ? Comment sortir de cette ambiguïté originelle et articuler les labellisations dont le projet de candidature au patrimoine mondial de l’Unesco (Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture) ?
Le présent chapitre s’intéresse donc aux discours sur les mises en scène de ce territoire dans une double perspective, celle du renforcement de la marque commerciale et celle d’une nouvelle labellisation. Nous questionnons d’abord la qualification « cathare » d’une revendication de marque perçue comme une référence commune désormais presque implicite. Cette approche diachronique de la marque s’inscrit dans un double processus, celui de la patrimonialisation qui institue le catharisme comme objet de patrimoine et celui, concomitant des labellisations, qui l’active auprès de publics potentiels.
Les premiers résultats de l’enquête de terrain à partir du cas de Lastours1 seront présentés dans un deuxième temps pour faire ensuite émerger, dans une cartographie complexe, la coexistence et la juxtaposition des marques sur le territoire audois. L’ensemble (analyse des représentations et des intentions de renouvellement du discours institutionnel sur le patrimoine et sa mise en tourisme) permet de dessiner les dynamiques à l’œuvre dans le redéploiement d’un projet territorial économique, culturel et patrimonial en cours de réinvention.
Cette recherche s’inscrit dans la continuité d’une première étude (Châtelet et al., 2020) dans laquelle nous avons analysé les médiations numériques du Pays cathare à partir de l’exemple de deux applications mobiles coproduites par le département de l’Aude. Nous avons ainsi pu démontrer que la mise en tourisme du Pays cathare est un processus hybride qui combine marketing territorial et narration patrimoniale médiatisée dans une dynamique complexe de jeux d’acteurs et de systèmes de représentation liés au phénomène historique cathare et à sa patrimonialisation. En 2020 il s’agissait davantage de comprendre comment le commanditaire institutionnel (le conseil départemental de l’Aude ou CD 11) pouvait faire dialoguer des historiens, des responsables de sites patrimoniaux et des spécialistes du numérique pour créer un discours de médiation sur le catharisme et le patrimoine départemental à travers des dispositifs numériques.
Le contexte et la marque « Pays Cathare » étaient présents en arrière-plan dans notre analyse de 2020 et nous en avions soupçonné la complexité à partir de nos premiers entretiens2. Le présent ouvrage sur les mises en scène des territoires et les stratégies de marque est l’occasion de mieux comprendre comment s’articulent les couches de discours repérées et les jeux d’acteurs rencontrés3.
Pour commencer cette analyse d’une marque, précisons, avec Mauricette Fournier, quelques définitions. Constatons d’abord qu’il existe un voisinage fort entre les deux notions de marque et de label qu’il est néanmoins coutumier de distinguer en réservant marque pour un usage privatif (les marques commerciales des entreprises par exemple) et label à une vocation collective (labels certifiant une qualité ou une origine). La marque est un signe distinctif, une étiquette décrivant un produit et le label est le résultat de l’action « pour le public et les acteurs [qui] revient à distinguer la qualité d’un patrimoine, d’un lieu, d’un produit, définir son authenticité » (Fournier, 2015, p. 9). Dans le cas qui nous occupe, les deux aspects semblent étroitement mêlés.
Il est important également de définir les mots utilisés pour cette marque « Pays Cathare » et de l’intégrer dans le paradigme du branding, c’est-à-dire le désir d’ouverture sur le monde et la volonté de narration d’une histoire de la marque. En effet, le marketing joue aujourd’hui sur plusieurs leviers. La publicité des produits se double désormais de la création d’un univers qui se focalise davantage sur le signe (la marque) que sur l’objet (le produit). « Pays Cathare » est une marque qui a inventé le signe avant le produit et l’histoire qui est racontée n’est pas tant celle de ce signe, avec son logo et son slogan, que celle d’un univers de référence hybride, historique et légendaire.
Troisième élément de réflexion préalable, la définition de l’expression même de cette marque, à savoir « pays » et peut-être le terme le plus important, « cathare ». Le « pays » (expression en vogue au début des années 1990, suite aux lois de décentralisation) dont il est question ici est un territoire (dirait-on aujourd’hui), en l’occurrence le département de l’Aude. Ce « pays » déborde un peu vers l’Ariège et le Tarn en fonction des coopérations engagées ou du discours historique convoqué. Ce « pays » comme produit est complexe car, au-delà du territoire géographique travaillé, c’est également une préoccupation historique et patrimoniale qui fonde le dispositif narratif de la marque qui veut délivrer une image liée à un passé mythifié et à un patrimoine à développer, qu’il soit matériel (des châteaux et des abbayes) ou immatériel (des croyances et un art de vivre).
« Aujourd’hui la marque répond de la culture du contenu et se décline selon des formes plurielles » (Le Nozach, 2014, p. 14). C’est ce contenu et cet univers historique qui sont au cœur de la démarche du conseil départemental de l’Aude qui a souhaité construire depuis 30 ans un récit, raconter une histoire, pour développer l’arrière-pays audois en crise (exode rural…) et ne plus se contenter du littoral et des vacances liées à la mer et au soleil. A posteriori peut-on inscrire cette démarche dans ce qu’on appelle le storytelling (Salmon, 2008) qui consiste à créer ou utiliser une histoire plutôt qu’à décrire le produit ? L’histoire de la marque se confond alors avec l’Histoire du territoire et de cette confusion originelle nait ce que nous proposons d’appeler un récit d’histoire mythifié, un « historytelling » (Fraysse, 2015). Ce récit va s’efforcer de vendre une destination, cet arrière-pays du département de l’Aude, un patrimoine, des châteaux et abbayes médiévales mais aussi des produits du terroir, le tout à partir d’éléments qui convoquent le mythe des Cathares en le réinterprétant radicalement. Ce faisant, il est possible de percevoir ce que les historiens britanniques Eric Hobsbawm et Terence Ranger (1983) appelaient « l’invention de la tradition », c’est-à-dire la mise en place d’un processus communicationnel qui consiste à inventer une histoire (dans tous les sens du terme, celui de récit et celui de chronologie ou de passé) pour légitimer une inscription dans la longue durée et relier les communautés contemporaines avec celles qui les ont précédées jadis sur le même territoire.
À ce stade, il nous faut aussi définir « cathare » pour bien comprendre le décalage originel entre un concept historique et religieux et son (més)usage contemporain dans une « tradition inventée ». Commençons par le plus simple, c’est-à-dire la réponse succincte de Google qui propose des mots clés synonymes comme châteaux en ruine, pitons rocheux, vieilles pierres, chevaliers… et des images médiévalisantes qui les accompagne. Tout cet imaginaire déployé de châteaux forts, de ruines, de résistance, d’esprit frondeur, de persévérance aussi… est symptomatique des simplifications et des raccourcis d’une vulgarisation rapide empreinte de fiction.
De son côté le dictionnaire Le Robert propose une définition plus conforme à l’histoire : « terme à connotation religieuse, désignant une croyance, un groupe d’hommes et de femmes, une organisation sur un territoire donné (actuels départements de Tarn, Haute-Garonne, Ariège, Aude…) à une période donnée (les 12e et 13e siècles) ».
En fait, pour les historiens, loin de constituer un continent stable et consensuel, le mot cathare est discuté. Notons simplement par exemple qu’au Moyen Âge (11e-13e siècles), le mot cathare n’est pas utilisé par les populations occitanes concernées (à peine 5 % de la population est impliquée dans cette dissidence et principalement les élites du comté de Toulouse). Le mot que l’on retrouve dans les documents historiques est « albigeois » ! Le terme cathare est une invention moderne qui n’apparaît qu’au 19e siècle dans une historiographie catholique orientée. Il s’impose dans les discours scientifique et médiatique dans les années 1950 et désigne alors tous les opposants médiévaux à l’Église catholique romaine, qualifiés d’hérétiques. Quelques folkloristes et romanciers en ont fait des résistants. Pilar Jiménez-Sanchez, historienne spécialiste des hérésies médiévales, a bien décrit ces phénomènes opposés, l’écriture de l’histoire scientifique fondée sur des documents et le développement de mythographies concurrentes (2008).
Cathares et Albigeois sont définis par l’historien Jean-Louis Biget dans le Dictionnaire du Moyen Âge qui rappelle ce qu’est le catharisme : « Évangélisme radical mué en dualisme, le catharisme demeure un christianisme, mais il enlève au Christ sa qualité de rédempteur. Il nie l’Incarnation – Jésus n’a pu revêtir un corps charnel – et la réalité de la Passion. Toutefois, le Christ est l’auteur de la Révélation ; il a enseigné aux hommes les préceptes de bonne vie et le sacrement qui permet aux âmes de retrouver la lumière : le baptême par l’Esprit Paraclet, « la consolation ». Un cycle de réincarnations permettra à chacun d’être sauvé à la fin des temps. Cette eschatologie optimiste ne comporte ni Jugement ni Enfer, car l’au-delà n’est que perfection » (2002, p. 231).
Dans notre enquête nous avons très peu rencontré ces informations sur ces questions religieuses complexes, sinon de manière allusive. En revanche, toute l’attention des acteurs est tournée vers ces magnifiques archipels du passé, ces signes indiciels de Moyen Âge qui s’imposent dans le paysage des Corbières ou de la Montagne noire et qu’une historiographie médiatique a qualifiés de « château cathare »4 ou de « citadelle du vertige » (Roquebert, 1966). En effet, c’est dans un premier temps sur différents supports médiatiques (articles dans le journal La Dépêche du Midi dans les années 1960, livres d’histoire et beaux livres d’images, magazines de vulgarisation et aujourd’hui des applications numériques) qu’un « travail territorial » (Noyer et al., 2011), consistant à construire une image et à associer un imaginaire aux lieux, s’est mis en place progressivement.
Ces premiers détournements, cette requalification (voire invention) du mot cathare dès le 19e siècle et l’attribution des châteaux capétiens formant frontière au 13e siècle après la croisade contre les Albigeois (1209-1229) aux « résistants cathares » pour en faire des « châteaux cathares », ont été suivis de simplifications du discours historique et d’un transfert de faux symboles. En effet, les simplifications que l’on observe traditionnellement dans la transposition des discours avec un passage du discours scientifique au discours de médiation dans le processus de vulgarisation (Jacobi, 2019) sont augmentées, dans le cas des Cathares, d’une sorte d’usurpation de sens, d’un mélange des registres de récits. Les fragments de signes historiques divers qui sont convoqués dans les médias et la communication territoriale proposent une fresque où, en reprenant les termes d’Hécate Vergopoulos (2010), se mêlent « de l’histoire (ce que l’on sait), des légendes (ce que l’on croit savoir) et du mythe (ce qu’on ne peut pas vérifier mais qui participe aussi de l’explication) ».
Il n’est qu’à demander aujourd’hui ce que le mot cathare représente dans l’esprit des acteurs du « Pays Cathare » que nous avons rencontrés, pour se rendre compte de ses confusions et du déclin progressif d’intérêt pour le terme et sa véritable connotation historique.
En 2010, dans le rapport La Marque Pays Cathare. Stratégie marketing pour « vendre plus et mieux » qui nous a été fourni par le conseil départemental, on pouvait lire : « Au terme de cette analyse, les univers qu’évoquent les mots “Pays Cathare” sont : château, religion, Moyen Âge, Histoire, guerre, massacre, tourisme, Aude. C’est donc un univers assez dur, sombre, rigoureux et ancien, très rattaché à l’histoire du catharisme et ses valeurs qui est évoqué par les mots de la marque Pays Cathare » (p. 19). Les rédacteurs du rapport soulignent donc l’événement principal de la croisade contre les Albigeois, cet épisode guerrier (1209-1229) qui mit fin à l’indépendance du comté de Toulouse au profit du domaine royal capétien. Une défaite pour les méridionaux donc, et une période troublée dont le document médiéval principal qui en fait le récit, La Canso, la chanson de la croisade,rédigé par les vainqueurs,était mis en exergue, dans les années 1990, par les guides dans ces châteaux, dits cathares pour souligner la courageuse résistance des « Cathares occitans » et la cruauté des « chevaliers français » conduits par le « sinistre Simon de Monfort ».
Nous avons donc là une histoire simplifiée qui pioche des éléments de narration dans la complexité du discours scientifique. La disproportion des forces en présence, la faiblesse du camp occitan ou encore la cruauté des représailles (massacres, bûchers), tous ces arguments sont exploités par les communicants du CD 11 qui proposent de retourner les faits : « cette faiblesse peut devenir une force à exploiter : un ancrage local fort, une histoire connue et unique, ainsi que le caractère spécifique du catharisme […], il existe une fierté de son territoire en Pays cathare, et cela peut devenir un vrai levier de communication ». L’histoire est dite « connue et unique », ce qui est une formule rapide quand on sait que le dossier est particulièrement complexe et que les historiens ne cessent d’évoluer dans des historiographies successives et parfois concurrentes. Quant à la « fierté ressentie sur le territoire », et donc à l’existence d’un sentiment d’appartenance et de continuité par rapport à l’histoire, il faudrait mener une enquête ethnologique auprès des habitants pour la confirmer ou l’infirmer5.
En 2021 une de nos interlocutrices du CD 11 rappelait pour sa part le caractère négatif associé aux représentations du mot cathare : « Quand je suis arrivée, j’étais sceptique sur la destination “Pays Cathare”. Rien que le mot est dur, phonétiquement… et du coup ça enferme la destination dans un univers […] de guerre, de défensive, de passé douloureux, de revendication, de quête de légitimité ». On voit là avec ces quelques exemples comment évolue le rapport à l’histoire et aux sites en fonction des générations. En 30 ans, entre 1991 et 2021, une génération d’acteurs du développement territorial a œuvré en laissant progressivement la place à une autre dont les représentations et le vécu sont forcément différents.
L’ensemble des personnes rencontrées ont souligné le rôle primordial de la gouvernance centrale du CD 11 et des maillons de la chaîne d’ingénierie territoriale qui a initié puis promu les démarches collectives. Le programme européen LEADER6 en faveur du développement rural a permis d’obtenir des financements pour l’aménagement des accueils touristiques des sites et le recrutement de professionnels de la médiation. Les châteaux appartenant à de toutes petites communes, ils n’auraient pas pu initier ce dialogue sans le réseau mis en place par le CD 11 dans le cadre du dispositif « Pays Cathare ». Tous ces acteurs isolés, qui avaient en commun les châteaux et cette histoire (principalement la croisade et ses conséquences), ont aussi pu bénéficier et participer à une action commune de médiation et de communication que l’on peut qualifier de transmédiatique (Dehondt et al., 2020). En effet, les sites ont récemment été réunis dans une boucle communicationnelle avec un site web, un ensemble de plaquettes imprimées formant collection et deux applications numériques.
Si l’objectif culturel d’explication de l’histoire et du patrimoine semble atteint avec cette communication transmédiatique, il n’en est pas de même pour l’objectif économique. Le travail de mise en visibilité de l’action du département au service des sites ne traduit décidément pas la complexité des dynamiques à l’œuvre dans le redéploiement d’un projet territorial dans ses dimensions économiques dont la marque « Pays Cathare » peine à faire émerger la spécificité, tant elle est imbriquée voire noyée dans un écosystème très dense de marques et de labels qui poursuivent les mêmes objectifs, patrimoniaux, touristiques ou économiques, sur des échelles différentes, du local à l’international.
Si le Pays cathare est bien présent sur le territoire avec des panneaux sur l’autoroute, des enseignes de toutes sortes (rôtisserie cathare, tacot cathare, sentier cathare, etc.), des affichages de la marque (qui regroupe aujourd’hui une quarantaine de produits : du miel au porc), il est finalement difficilement définissable sur le territoire audois lui-même multi-marqué et sur-labellisé.
Utiliser la question cathare comme différenciation, et comme héritage de la construction historique récente par l’usage du terme dans les actions de valorisation et de marketing territorial, n’a pas permis une bonne visibilité et une nette compréhension de l’organisation de cette gouvernance, ni de saisir facilement les développements en cours.
Après avoir fait le point sur les notions, il est nécessaire maintenant de présenter la marque dans une approche diachronique qui décrit les points forts et les points faibles de la marque sur le territoire depuis 1991, et d’analyser la concurrence marquante et labellisante dans une présentation synchronique.
La réinvention du Pays cathare dans l’acte II à partir de 2011 a permis de faire le point sur les dynamiques à l’œuvre dans le redéploiement d’un projet territorial dans ses dimensions économique, touristique et patrimoniale.
Dès 1989, le constat de récession économique, de recul démographique et d’exode rural du département aboutit à la constitution d’un programme de développement intégré avec trois axes de travail sur le patrimoine, l’économie et le territoire. L’entrée la plus simple, parce que la plus visible, consistait à travailler sur le patrimoine ou ce qui était en cours de patrimonialisation à savoir les châteaux et les abbayes, autrement dit le patrimoine monumental et médiéval qui s’impose dans le paysage. Dans ce premier axe, des actions de valorisation des sites sont menées pour faire de ce patrimoine un levier de développement économique. Le résultat le plus spectaculaire est la constitution du réseau des sites. Le logo de départ qui embrassait toutes les actions va laisser la place à trois signatures graphiques à partir de l’acte II.
Le deuxième axe, directement lié au premier, est de faire du territoire du département de l’Aude une « marque de destination ». Ce qui se traduit dans le jargon du marketing territorial par une « mise en synergie des acteurs (publics, privés, citoyens…) pour une gouvernance participative ». L’acte II et le travail de l’agence de développement touristique (ADT) vont permettre de faire émerger une stratégie de communication spécifique pour l’ensemble des acteurs du tourisme de l’Aude, avec un logo et un slogan qui réintègrent le nom du département, Aude, à côté du nom de la marque, Pays Cathare. Le slogan, « Le Sud a son histoire », introduit de la confusion même si on devine la volonté de s’arrimer à l’histoire et au patrimoine du premier axe d’un côté, et peut-être aussi à la marque concurrente Sud de France, qui embrasse l’ensemble de la région Occitanie, de l’autre.
L’aboutissement de ces actions est enfin économique et constitue le troisième axe. Il s’agit du cœur de la marque, ce qui correspond le mieux à la définition de marque, c’est-à-dire créer un signe distinctif permettant de garantir l’origine de fabrication et de commercialisation d’un produit ou d’un service. C’est le volet agroalimentaire, artisanal et touristique de la marque « Pays Cathare » qui est déposée en 1991. De très nombreuses activités agricoles ou artisanales sont alors recensées et réparties dans 14 classes. La marque élargit progressivement ses actions de qualification des activités touristico-économiques sur le territoire. Quelques exemples illustrent ce développement. En 1992, les premières chartes de qualité sont proposées aux restaurateurs et hébergeurs. En 1993, la marque s’ouvre aux guides-conférenciers et aux vignerons, entre autres. En 1997, les artisans de métiers d’art rejoignent la marque et en 2002, on ouvre plus largement encore l’éventail aux activités de pleine nature, aux sites touristiques et aux lieux de visite. Cet élargissement se poursuit de façon un peu foisonnante jusqu’en 2011 où la stratégie se resserre et définit quatre lignes de produits : gastronomie et saveurs, séjours, activités et découvertes et enfin artisanat d’art et accueil vigneron. Le logo bleu et le slogan « Signé Pays Cathare » voisine avec le A majuscule stylisé du nom du département Aude.
En 2015, lors du lancement officiel de l’acte II, la stratégie poursuit les actions pour le développement économique, touristique et la valorisation des sites et définit une nouvelle charte graphique. Les actions tracées entremêlent toujours les trois axes du début, patrimoine, tourisme et développement économique, et tentent de redynamiser leurs acteurs respectifs et de repenser les partenariats existants.
Cette relance du Pays Cathare avec l’acte II au début des années 2000 correspond également à la période de fort développement des labels patrimoniaux qui accompagnent une patrimonialisation généralisée. Lorsque tout devient patrimoine dans la société, cela devient visible dans l’espace public et un foisonnement des marques et des labels inonde le territoire. C’est particulièrement le cas dans l’Aude.
La labellisation participe-t-elle du processus de patrimonialisation ? C’est la question que l’on peut en effet se poser quand on constate cette « explosion labellisante » comme la nomme joliment Maria Gravari-Barbas (2005). Notre approche infocommunicationnelle de ces phénomènes nous incite en effet à placer les labellisations patrimoniales dans le schéma de Jean Davallon (2006) qui distingue plusieurs étapes accompagnées de documents et de communication, entre l’institutionnalisation de l’objet de patrimoine et son activation auprès des publics par la médiation.
Nous retrouvons toute la gamme des labels et des marques sur le territoire du Pays cathare, depuis le classement monument historique des châteaux, des abbayes et des villages médiévaux de l’Aude, jusqu’aux derniers labels communicationnels des associations d’élus ou des collectivités. Le rapport de Martin Malvy en 2017 dresse la liste des labels patrimoniaux et touristiques dans laquelle nous retrouvons nos exemples audois et cathares. À commencer par le classement au titre des monuments historiques (MH). Tous les châteaux du Pays cathare sont classés MH. Ceux de Lastours l’ont été en 1905. Le ministère de la Culture est en effet un des acteurs de ce double processus de patrimonialisation et de labellisation. En plus de la notion de monuments historiques que ces agents (inspecteurs et architectes) ont patiemment mise au point et confortée depuis les années 1830, le ministère est également à l’initiative d’autres distinctions que l’on peut ranger aujourd’hui dans la catégorie des labels. Citons, parmi tant d’autres, le label des Villes et Pays d’art et d’histoire (VPAH, depuis 1985) et Sites patrimoniaux remarquables (SPR institués dans la loi LCAP de 2016). Carcassonne qui cumule presque tous les labels est une Ville d’art et d’histoire depuis 2015. Le catharisme est concerné par VPAH avec les Pyrénées cathares – Pays d’art et d’histoire (2009), un Pays cathare ariégeois ! Le ministère de l’Environnement a également son label pour le patrimoine naturel, Grand Site de France (depuis 2002) et celui de l’économie a créé les Villes et Villages Fleuris en 1959. Carcassonne possède également ces étiquettes. Le réseau des sites du Pays cathare tend à se comporter comme un label patrimonial, sans en être véritablement un, et pourrait, en tant que tel, se rapprocher de ces labels prestigieux, en déclinant ces critères sur le territoire local de l’Aude et de ses périphéries occitanes.
Au-delà de ces labels « officiels » et nationaux, il existe également une myriade de labels associatifs ou initiés par les collectivités locales qui, dans une frénésie concurrentielle, désirent se démarquer. C’est souvent à partir de la communication que le processus de labellisation se met alors en place. L’objectif n’est plus seulement de communiquer sur le patrimoine mais d’utiliser le patrimoine comme un prétexte intégré dans une stratégie de communication plus globale. Il s’agit alors d’une démarche de développement territorial et/ou de recherche d’identité régionale. Les Plus Beaux Villages de France sont une initiative de ce type (1982, association d’élus). Fanjeaux ou Lagrasse s’en réclament. Mais l’étiquette la plus connue dans cette catégorie et dans la région est le label-marque-contrat Grand Site Occitanie – Sud de France (GSO, depuis 2008). C’est en effet un hybride entre un label et une marque, dans la mesure où on a réuni le label Grand Site Midi-Pyrénées de l’ancienne région Midi-Pyrénées et la marque Sud de France de l’ancienne région Languedoc-Roussillon quand les deux régions ont fusionné en 2016. En fait, il s’agit d’un contrat passé par la Région avec une collectivité locale pour développer une politique touristique et de développement durable à partir du patrimoine. Carcassonne est encore là évidemment, avec d’autres châteaux du Pays cathare. Le titre donné à ce grand site d’Occitanie est « Carcassonne et citadelles du vertige »7. La marque de destination Aude Pays Cathare entre dans cette catégorie.
La marque nationale Qualité Tourisme à laquelle s’est raccrochée Sud de France sur son volet commercial est la plus importante dans cette catégorie. C’est elle qui dicte les principes sur lesquels doivent reposer les paramètres de qualité que les marques régionales ou plus locales vont adopter. On peut donc considérer que la marque « Pays Cathare » s’emboite dans la marque Sud de France pour l’Aude et que Sud de France est une déclinaison de Qualité Tourisme.
Pour finir cette typologie des marques et labels, il nous faut également évoquer le label le plus prestigieux dans la catégorie patrimoniale, à savoir patrimoine mondial décerné par l’Unesco et son Centre du patrimoine mondial. Le Pays cathare est déjà concerné par l’inscription de la cité de Carcassonne dès 1997 sur cette liste prestigieuse. La ville de Carcassonne communique d’ailleurs, malgré sa collection de labels patrimoniaux et touristiques, presque exclusivement sur lui. Le logo de la ville évoque de manière stylisée la cité et ses remparts, le pont sur l’Aude ou le canal du Midi et la statue de Neptune de la place centrale de la bastide Saint-Louis mais surtout souligne son appartenance au cercle restreint des villes du patrimoine mondial. Il est également très intéressant de voir apparaitre depuis quelque temps un nouveau logo, arboré par les autres châteaux du Pays cathare, de nouveau qualifiés de « citadelles du vertige » par les communicants du CD 11 : les citadelles du vertige, en lice pour l’Unesco.
En effet une nouvelle candidature est en cours pour inscrire sur la liste du patrimoine mondial les châteaux de l’Aude et de l’Ariège. Cette initiative pour décrocher un énième label illustre ces efforts pour renouer avec un discours historique scientifique. Notre enquête démontre que si à Lastours on se diversifie et on construit un discours complémentaire aux Cathares, avec la candidature à l’Unesco, on tourne délibérément le dos aux Cathares.
Cette profusion de labels est aussi une profusion de noms, d’images et de discours. On peut alors se demander s’ils se font véritablement concurrence ou si au contraire, dans l’ombre du plus prestigieux, le patrimoine mondial de l’Unesco, cette profusion ne permet pas de faciliter la visibilité et la circulation de ces noms, de ces images et de ces discours dans une saturation bénéfique ?
Nous venons de voir que la marque Pays Cathare hésitait entre label et marque et qu’en définitive le CD 11 a opté pour un hybride qui répond à la fois à ses intentions de départ mais qui s’insère aussi dans un écosystème communicationnel et concurrentiel. Aujourd’hui, la stratégie des acteurs en présence cherche à renouer avec un des objectifs originels qui était de lier l’histoire et le patrimoine avec le développement économique. Si un réseau de médiateurs répartis sur le territoire a pu se constituer et monter en compétences professionnelles, le volet culturel s’est perdu au fil des années au profit d’une offre touristique et commerciale inégale. Les récents efforts communicationnels (les deux applications) pour renouer les liens avec l’histoire et le patrimoine ne semblent pas suffisants pour combler l’écart entre un discours scientifique complexe et un discours marketing qui pourrait passer pour simplificateur.
Malgré tout, la situation évolue dans ce « pays » qui cherche encore ses limites (historiques et géographiques) et qui tente de dépasser, voire de supprimer, cette appellation de cathare si complexe, en recourant de nouveau à l’histoire. L’exemple de Lastours permet d’illustrer ces changements, à la fois par le travail de définition de son patrimoine étendu à d’autres périodes que le Moyen Âge et à d’autres thématiques que le monumental, mais aussi par sa participation à cette candidature à l’Unesco. Les élus et responsables du site que nous avons rencontrés ont retracé l’histoire de leur engagement pour le développement touristique du village. Leur action continue depuis 1991 illustre parfaitement ce lent glissement de l’utilisation du mot cathare et de la notion de catharisme qui furent des déclencheurs dans la communication et la création de la marque. Progressivement son utilisation s’estompe et Lastours s’affiche autrement, par-delà les Cathares, alors que le département de l’Aude choisit également de candidater à l’Unesco sans les Cathares.
Tout le travail de valorisation des sites qui a consisté à terminer le processus de patrimonialisation cher à J. Davallon (2006) par son activation auprès des publics dans des médiations multiples (dont les labellisations) est très bien illustré par l’exemple de Lastours. En effet, les élus et responsables du site de Lastours, que nous avons rencontrés en juin 2021, ont montré cette évolution dans la présentation de « leurs châteaux » et du contexte du Cabardès, porte d’entrée vers Carcassonne.
En effet, entre les années 1980 et aujourd’hui, un développement intense a eu lieu. Les quatre châteaux ont été restaurés, des fouilles archéologiques programmées ont été réalisées, le développement touristique a bénéficié de la mise aux normes de l’accueil mais aussi d’un intense travail de documentation qui a permis de diversifier le discours de médiation proposé aux visiteurs. La croisade contre les Albigeois est toujours racontée mais elle n’est plus forcément aujourd’hui au centre du discours des guides. La vie quotidienne du village de Cabardès, village cathare s’il en est un, est préférée désormais aux événements guerriers. L’archéologie a en effet permis de découvrir des objets du 13e siècle dans ce village abandonné et les recherches historiques insistent aussi sur la poésie occitane des troubadours du Moyen Âge. Ainsi le discours historique médiévalisant complète le catharisme et la croisade avec la vie quotidienne et la poésie. Des animations et des ateliers proposent aux publics de découvrir tous ces aspects dans des médiations actuelles, tout à la fois immersives (les guides sont costumés) et ludiques.
Le travail de la mine, de la métallurgie ou du tissage est également placé au centre d’un nouveau discours de médiation avec la présentation de la géologie, de la faune et de la flore du territoire. La plaquette imprimée distribuée aux visiteurs sur place, le site web comme l’application « Pays Cathare, le guide » insistent pour Lastours sur ces aspects et élargissent la période racontée, en remontant à la Préhistoire pour la géologie et les mines. L’accueil du site étant installé dans une ancienne usine textile, cette industrie (filage, tannage, etc.) est également racontée. Le but étant de faire découvrir tout le territoire du Cabardès, et pas seulement les châteaux et l’épisode guerrier de la croisade. Les châteaux restent une porte d’entrée importante mais c’est le terroir qui est mis à l’honneur dans le discours mais aussi dans la boutique, répondant ainsi à une demande de diversification des visiteurs qui ne sont pas tous des passionnés d’histoire mais aussi des amateurs de nature, des randonneurs ou de simples curieux. Les fouilles archéologiques du village ont également permis de diversifier le discours vulgarisateur d’une histoire médiévale moins guerrière en orientant le regard sur la vie quotidienne, le terroir et les coutumes d’un pays qu’on ne peut réduire à la guerre.
Au-delà de l’exemple de Lastours qui décline une offre touristique et culturelle plus étendue pour dépasser l’image trop guerrière de la période cathare, le département de l’Aude de son côté candidate désormais à l’Unesco sans les Cathares. La démarche de labellisation,par la candidature en cours à l’inscription sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco, semble venircombler un déficit de notoriété scientifique et culturelle. En effet, l’expression « Pays cathare » portéepar la marque n’a fait qu’attiser les critiques des spécialistes de l’histoire et du patrimoine qui s’érigentdepuis longtemps contre ce stéréotype des « châteaux cathares », lequel – et ce malgré les récentsefforts de mise au point – persiste dans le discours médiatique. Le document de candidature en coursne fait d’ailleurs plus allusion aux Cathares mais vise la promotion de la cité de Carcassonne et d’une série de sept châteaux « sentinelles de montagne », le tout formant un ensemble médiéval témoin d’un programme défensif frontalier et de contrôle d’un territoire (le sud du Languedoc).
Le nom de la structure porteuse du projet de candidature au patrimoine Unesco, créée en 2019, illustre cette volonté d’abandonner les Cathares et de se concentrer sur l’histoire de ces châteaux capétiens post-croisade : association Mission patrimoine mondial – Cité de Carcassonne et ses châteaux sentinelles de montagne. En effet cette candidature ne repose pas sur l’histoire du catharisme en tant que telle. La valeur universelle exceptionnelle de cette candidature tient à la période post-cathare qui est l’implantation du pouvoir royal sur ce territoire et repose donc sur ce qui reste dans le paysage. Les châteaux s’imposent, mais il convient désormais de les débarrasser de cette gangue légendaire qui les rattache aux Cathares. Les porteurs de cette candidature insistent sur le fait que ces monuments sont ceux qui ont été édifiés par le pouvoir royal « dans une stratégie castrale et militaire au service du contrôle du territoire avec une maison mère qui est la cité de Carcassonne d’où partent les hommes, les vivres et les armements à l’époque vers les autres sentinelles réparties dans la montagne ».
Désormais, le véritable patrimoine du Pays cathare est celui-là, un patrimoine monumental et médiéval auquel on peut rajouter des éléments naturels (la géologie, la faune, la flore comme à Lastours) et des aspects immatériels comme la poésie courtoise et la vie quotidienne au Moyen Âge. Le recours à l’archéologie et à l’histoire montre qu’il n’est pas vraiment possible de définir un patrimoine cathare. Les historiens ont montré que ces bons hommes et bonnes femmes étaient peu nombreux dans la société. Ils rejetaient toute richesse et tout matérialisme et n’ont donc pas construit d’églises ni de châteaux auxquels on pourrait rattacher un style cathare. Adoptant un mode de vie très simple (vœu de pauvreté et d’humilité sur le modèle apostolique des premiers temps chrétiens), ils ont en fait influencé leurs adversaires qui eux ont inventé l’art cistercien puis les ordres mendiants (franciscains et surtout dominicains à Toulouse), autant d’éléments toujours présents dans le paysage rural comme urbain et qui constituent un patrimoine occitan remarquable.
Mais les discours qui circulent à propos de cette histoire ne sont pas qu’historique et scientifique. La concurrence, entre l’histoire véritable de ce territoire et la légende ou les mythes qui ont été forgés a posteriori, est visible aujourd’hui dans ces couches de discours qui se superposent dans les médias, les marques et les labels. Les médias ont travaillé le territoire de l’Aude pour forger une identité quelque peu factice. La communication institutionnelle du département de l’Aude a fait usage de l’histoire et des mythes dans sa construction territoriale et son rapport aux lieux qu’ils contribuent à configurer par les structures signifiantes qu’ils agencent (marques et labels) et les contenus qu’ils produisent.
Cette enquête sur la mise en scène du territoire audois à partir de son patrimoine a montré comment le marketing peut détourner l’histoire pour inventer un pays légendaire à partir d’un mot, cathare, détourné de son sens originel. Les détournements sont d’ailleurs nombreux et sont d’abord le fait des historiens eux-mêmes puis celui des médias et de la littérature avant d’être reprochés aux médiateurs ou aux communicants.
Aujourd’hui, le terme cathare semble être un handicap. Il est trop chargé de significations différentes, plus mythologiques qu’historiques. Sa circulation, son utilisation, ses nombreux usages en ont fait un être culturel (Jeanneret, 2008) c’est-à-dire un objet sursignifiant dont la communication publique et le marketing territorial se sont saisis pour en faire un usage non historique du passé (Bartholeyns, 2010). La marque Pays Cathare a finalement transformé l’histoire et le Moyen Âge dans un récit dont l’objectif était de susciter un plaisir dépaysant à partir d’images stéréotypées pour déclencher des ventes (de produits du terroir ou des services touristiques) et des visites (de sites). Désormais le mot cathare et l’expression châteaux cathares sont disqualifiés. Si la marque Pays Cathare continuera à porter ce nom tout en diversifiant ses logos et son discours, le projet de labellisation au patrimoine mondial abandonne le mot. Mais la communication de la candidature en annonçant des « citadelles du vertige » en lice vers l’Unesco pour ces sentinelles de montagne chères aux historiens réintroduit une ambiguïté dont le Pays cathare semble se régaler.
Résumé : L’invention de la marque « Pays Cathare » au début des années 1990 intervient dans un territoire rural en déprise économique. L’objectif du département de l’Aude était triple : territorial, patrimonial et économique. Il s’agissait de diversifier les ressources touristiques en mettant en lumière les vieilles pierres de l’arrière-pays ; de professionnaliser l’accueil dans les sites patrimoniaux ; et de dynamiser un réseau de producteurs et une filière touristique. Aujourd’hui, après 30 ans de développement, la marque s’est réinventée et propose un réseau de sites bien équipés, une marque de destination touristique et une signature marketing pour des produits locaux et des hébergements. En hésitant entre marque et label, le « Pays Cathare » a également dû s’adapter à la demande de précision historique et archéologique qui rend le terme cathare difficile à exploiter. L’enquête menée auprès des acteurs du département de l’Aude (élus, agents de développement, médiateurs) a mis en lumière les enjeux de cette réinvention et de cet abandon progressif du terme cathare dans les discours et dans le projet de labellisation des châteaux au patrimoine mondial.
Abstract: The invention of the “Pays Cathare” brand in the early 1990s took place in a rural area in economic decline. The objective of the Aude department was threefold: territorial, heritage and economic. The aim was to diversify the tourist resources by highlighting the old stones of the hinterland; to professionalize reception in heritage sites; and to boost a network of producers and a tourist industry. Today, after 30 years of development, the brand has reinvented itself and offers a network of well-equipped sites, a tourist destination brand and a marketing signature for local products and accommodation. By hesitating between brand and label, the “Pays Cathare” has also had to adapt to the demand for historical and archaeological precision which makes the term Cathare difficult to exploit. The survey carried out among the actors of the Aude department (elected officials, development agent, mediators) highlighted the challenges of this re-invention and of this gradual abandonment of the term Cathare in speeches and in the labeling project. world heritage castles.